
La présidente du groupe parlementaire de la France Insoumise est convoquée à son tour pour « apologie du terrorisme ». Une attaque qui marque le saut répressif opéré par l’Etat pour s’en prendre aux soutiens de la Palestine et impose une riposte collective
Ce mardi, la député et présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale Mathilde Panot a annoncé être convoquée par la Direction de la Police Judiciaire de Paris dans le cadre d’une enquête pour « apologie du terrorisme ». D’après la député du Val-de-Marne, cette convocation se fonderait sur le communiqué officiel de son groupe parlementaire publié le 7 octobre. (...)
Il s’agit d’une nouvelle étape dans l’offensive menée par l’Etat pour réprimer les soutiens à la Palestine, après la condamnation du secrétaire général de l’UD CGT 59 à 1 un an de prison avec sursis pour « apologie du terrorisme », la convocation pour ce même motif de nombreuses personnalités politiques et syndicales comme Anasse Kazib, la candidate LFI aux européennes Rima Hassan, la journaliste SIhame Assbague ou les étudiants de Solidaires étudiant.es EHESS.
Alors que jamais un président de groupe parlementaire n’avait été visé de la sorte en raison d’une expression politique, cette convocation de Mathilde Panot, présidente du troisième groupe le plus nombreux à l’Assemblée, marque un saut dans l’escalade répressive. En s’attaquant à une personnalité qui fait partie de la direction d’une force politique arrivée en troisième positon au dernier scrutin présidentiel, l’Etat veut faire passer un message clair : tous ceux qui soutiennent la Palestine sont menacés de poursuites et de mesures répressives.
Cette convocation survient également dans le contexte des élections européennes, après l’interdiction la semaine dernière d’une conférence de Jean-Luc Mélenchon et Rima Hassan, par l’Université de Lille puis par la Préfecture du Nord. Dans le même sens ce lundi, l’Université Paris-Dauphine a annulé une conférence organisée par le Comité Palestine de l’université, qui réunissait la militante franco-palestinienne Rima Hassan et Ivar Ekeland, un ancien président de Paris-Dauphine engagé dans le mouvement universitaire pour la Palestine, prétextant un risque de « trouble à l’ordre public ». En pleine campagne électorale, la criminalisation du soutien à la Palestine permet d’empêcher l’expression d’opposants. (...)
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– (Mediapart)
« Apologie du terrorisme » : Mathilde Panot convoquée, dernière d’une longue liste
La présidente du groupe LFI à l’Assemblée va devoir s’expliquer sur un communiqué publié le 7 octobre 2023. Selon nos informations, 385 signalements pour des propos liés à la guerre au Proche-Orient ont été transmis à la justice entre le 7 octobre et le 31 décembre 2023. Une enquête a été lancée dans presque tous les cas. (...)
« J’alerte solennellement sur cette instrumentalisation grave de la justice visant à bâillonner des expressions politiques », a déclaré mardi 23 avril Mathilde Panot, présidente du groupe La France insoumise à l’Assemblée nationale, en annonçant qu’elle était convoquée par « la direction de la police judiciaire » de la préfecture de police de Paris, « pour être entendue dans le cadre d’une enquête pour “apologie du terrorisme” ».
Convoquée en audition libre, Mathilde Panot n’est à ce stade poursuivie pour aucun délit. Mais selon elle, « c’est donc la première fois dans toute l’histoire de la Ve République » qu’un·e dirigeant·e de groupe d’opposition à l’Assemblée « est convoqué·e pour un motif aussi grave », sur, insiste-t-elle, « la base d’accusations fallacieuses ». (...)
« J’appelle tout un chacun à prendre conscience de la mesure des atteintes alarmantes contre la liberté d’opinion et contre la démocratie », alerte Mathilde Panot dans son communiqué. « La police convoque sans état d’âme à tour de bras une liste que l’on dit très longue. Toute la sphère politique et intellectuelle antigénocide est menacée », a déclaré pour sa part Jean-Luc Mélenchon.
De fait, l’annonce de cette convocation est la dernière d’une longue liste de procédures ouvertes pour « apologie du terrorisme », qui semble s’être brusquement allongée en quelques jours. (...)
« Ces convocations s’inscrivent dans le cadre de la répression féroce qui touche de nombreux militants politiques, syndicaux ou associatifs depuis sept mois, afin de criminaliser toute solidarité avec le peuple palestinien », a déclaré Anasse Kazib dans un communiqué.
« Cela interroge sur les libertés publiques et la dérive autoritaire du gouvernement », commente pour sa part Thomas Portes, député LFI auprès de Mediapart, s’inquiétant d’« un déploiement de plaintes sur un arc extrêmement large ».
Le NPA visé dès novembre
LFI n’est pas le seul mouvement politique ciblé. Le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) l’a été aussi, dès le mois de novembre, pour un communiqué daté du 7 octobre, apportant son « soutien aux Palestinien·nes et aux moyens de lutte qu’ils et elles ont choisis pour résister », qui se concluait par le mot « Intifada ! ». Le directeur de la publication du site du NPA a été entendu. « Depuis, nous n’avons aucune nouvelle des suites que pourrait donner le parquet », indique le parti. (...)
Selon les informations de Mediapart, entre le 7 octobre et le 31 décembre 2023, le pôle national de lutte contre la haine en ligne du parquet de Paris a reçu 385 signalements en lien exclusivement avec le conflit au Proche-Orient. Pour toute l’année 2022, il avait reçu 500 signalements, tous sujets confondus. Ces signalements peuvent être relayés par les autorités, par des particuliers via la plateforme Pharos de lutte contre la haine en ligne ou par des plaintes déposées auprès des procureurs.
Le parquet de Paris a ouvert des enquêtes pour chacune de ces plaintes. Une fois l’auteur des propos identifiés, il a confié 76 dossiers à des parquets locaux, aussi susceptibles d’ouvrir des enquêtes sur la base de signalements reçus directement. Le parquet de Paris a classé sans suite 40 procédures faute d’avoir pu identifier un auteur, et en a seulement classé 6 car les propos n’étaient à ses yeux pas constitutifs d’infraction. (...)