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Non Fiction
Les révolutions, un phénomène ordinaire
#Revolutions
Article mis en ligne le 5 décembre 2023
dernière modification le 3 décembre 2023

Phénomènes globaux et connectés, les révolutions apparaissent comme un mouvement récurrent de l’histoire. C’est notamment sur ces connexions que reviennent un collectif de chercheuses et chercheurs. (...)

Tout en soulignant l’importance des « grandes révolutions » française, américaine, russe ou chinoise, les auteurs provincialisent avec rigueur le phénomène révolutionnaire pour en saisir toute sa complexité. L’historienne Eugénia Palieraki et l’historien Quentin Deluermoz, qui ont codirigé ce livre avec Ludivine Bantigny, Boris Gobille et Laurent Jeanpierre, nous présentent quelques-unes de leurs pistes de réflexion.

Nonfiction.fr : Vous êtes réciproquement spécialistes des gauches latino-américaines et de l’Europe du XIXe siècle, la révolution est donc au cœur de vos recherches. Néanmoins, pour ce projet vous avez dû couvrir ce concept depuis les chasseurs-cueilleurs jusqu’à la mondialisation et aux « printemps arabes », puis de la Chine au Mexique, en passant par l’Iran et l’Europe. Quelle était votre définition de la Révolution avant d’entreprendre ce projet et a-t-elle évolué depuis ?

Eugénia Palieraki

(...) la réflexion que nous menons sur la longue durée a permis de révéler à la fois la permanence de la révolution – « la révolution est installée dans l’histoire », concluons-nous – et la redéfinition en cours de cette notion centrale de la modernité politique, cette re-sémantisation étant probablement concomitante de la crise actuelle du projet moderniste. Les mouvements révolutionnaires récents, à la fois très connectés et très ancrés dans des dynamiques locales, parmi lesquels le féminisme occupe une place centrale, privilégient la constitution du collectif révolutionnaire selon des principes égalitaires et démocratiques à la conquête de l’État, ce dernier projet perdant la centralité qu’il avait au XXe siècle.

Quentin Deluermoz : Pour ma part, l’angle de départ est un peu différent. Je suis surtout un historien des ordres et des désordres de l’Europe du XIXe siècle. A partir d’approches diverses (histoire sociale et culturelle, jeux d’échelle, croisement disciplinaire, analyse contrefactuelle), et en m’appuyant sur plusieurs terrains associés à la « modernité » (la police, la ville, l’Etat-nation, les cultures sensibles… et les révolutions), mon travail consiste à essayer de penser sous de nouveaux angles la « grande transformation » de ce siècle, dont on a longtemps dit, précisément, que l’Europe était le siège ou le centre unique. (...)

d’une part, ce panorama de longue portée confirme l’existence d’une rupture qui opère de manière graduelle entre le XVIIe et le XVIIIe ; d’autre part, il montre que la notion de « révolution », qui émerge en même temps que le rapport au temps dit « moderne » (avec l’idée de progrès) se sédimente autour d’une pluralité insoupçonnée d’expériences qui vont bien au-delà des seuls territoires européens. Enfin, il permet de pointer des mouvements de profondeurs plus silencieux, comme l’émergence, signalée par Eugénia, de possibles nouvelles manières de penser et de faire révolution depuis les années 1990-2000. (...)

Une histoire globale des révolutions
Ludivine Bantigny , Quentin Deluermoz , Boris Gobille , Eugénia Palieraki , Laurent Jeanpierre
2023 - La Découverte 1200 pages