
Depuis le début de la riposte israélienne à l’attaque du Hamas du 7 octobre, les préfets sont mobilisés pour interdire des manifestations, mais également des conférences ou des projections de films, organisées en soutien aux Palestiniens. (...)
Si les rassemblements en soutien aux victimes israéliennes de l’attaque du Hamas du 7 octobre, notamment celui du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) à Paris le 9 octobre, ont pu avoir lieu, ceux organisés en soutien aux victimes palestiniennes de la riposte israélienne ont été, dans un premier temps, systématiquement interdits.
Une politique assumée par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, dans un télégramme envoyé le jeudi 12 octobre aux préfets. « Les manifestations propalestiennes, parce qu’elles sont susceptibles de générer des troubles à l’ordre public, doivent être interdites », affirmait-il alors. (...)
durant les dix premiers jours de la riposte israélienne, la quasi-totalité des appels à manifester, qui ont été diffusés massivement un peu partout en France, ont fait l’objet d’une interdiction préfectorale.
Seuls quelques rassemblements s’étaient alors tenus, dans le calme malgré leur interdiction, comme celui organisé mercredi 11 octobre à Bordeaux par le comité Action Palestine. Et, dans quelques rares exceptions, des rassemblements n’ont pas été interdits, en entorse à la consigne nationale donnée par Gérald Darmanin. Ce fut le cas encore à Bordeaux dès le jeudi 12 octobre pour une manifestation organisée par le Collectif girondin pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens. (...)
De nombreuses réunions ou conférences avaient été visées par des arrêtés préfectoraux. (...)
Les préfets contraints « d’apprécier au cas par cas »
Saisi en référé par le comité Action Palestine, le Conseil d’État a mis fin à cette politique d’interdiction systématique dans une décision rendue mercredi 18 octobre. Dans celle-ci, le juge administratif suprême rappelle qu’un ministre de l’intérieur n’a pas le droit d’interdire les manifestations d’un quelconque mouvement d’une manière générale, indifférenciée et sur l’ensemble du territoire.
C’est en effet à chaque préfet « d’apprécier au cas par cas » les déclarations de manifestation et de n’en interdire que lorsque les circonstances l’imposent. Le Conseil d’État soulignait encore la « regrettable approximation rédactionnelle » du télégramme de Gérald Darmanin qu’il qualifiait en conclusion d’« atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de manifestation et d’expression ». (...)
Depuis, les interdictions sont devenues beaucoup plus erratiques, dépendantes de circonstances mais également de politiques extrêmement variables suivies par les préfets. (...)
Un peu partout en France on retrouve une même versatilité apparente des politiques préfectorales et parfois des décisions des juges administratifs. Dans de nombreux cas cependant, ces derniers semblent moins hésiter à annuler les arrêtés d’interdiction, comme par exemple à Nancy ou Vannes pour des rassemblements qui s’étaient tenus le samedi 4 novembre.
Mais dans de nombreux autres cas, les rassemblements restent interdits, soit parce que l’a décidé le tribunal administratif, soit parce que les organisateurs ne l’ont pas saisi, souvent par manque de temps. (...)
Ces dernières semaines, la répression des manifestations de soutien aux Palestiniens semble être revenue à un niveau comparable à celle d’autres mobilisations. C’est ainsi que la marche contre le racisme organisée le dimanche 21 avril à Paris avait été interdite par la préfecture de police, avant d’être autorisée le vendredi par le tribunal administratif.
En dehors des manifestations, les divers évènements organisés par les mouvements de soutien aux Palestiniens continuent, eux, d’être régulièrement interdits. (...)
Cette répression touche également de plus en plus la mobilisation au sein des universités et des établissements d’enseignement supérieur. Au mois de mars, Sciences Po Paris s’est par exemple retrouvée au centre d’une polémique ayant conduit à l’annulation, jeudi 14 mars, d’une soirée de soutien.
Et désormais, elle a passé un nouveau stade avec l’activation de procédure non plus administrative, mais judiciaire à l’encontre de responsables politiques accusés « d’apologie du terrorisme ».