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Elucid media/Roland Gori
Les « fake news » sont en réalité le miroir de notre conscience collective
#fakenews
Article mis en ligne le 25 mai 2024
dernière modification le 22 mai 2024

Quel besoin pousse notre continent à utiliser l’anglais pour décrire une réalité pourtant analysée par ses historiens ? C’est comme s’il fallait que les recherches continentales du dernier siècle traversent l’Atlantique pour qu’à leur retour en Europe, « ripolinées » par le lexique américain, nous puissions nous y intéresser.

Des Troubles de la personnalité multiple, décrits par Pierre Janet, par exemple, à l’analyse des micro-pouvoirs par Michel Foucault, en passant par les fake news, les faits sont têtus : bien des concepts importés de la culture états-unienne ont été made in Europe. C’est ainsi que les fake news ont éclipsé les « fausses nouvelles » (2) analysées par un des plus grands historiens français du XXe siècle, Marc Bloch.

Il faut dire qu’en matière de « faits alternatifs », les partisans de Donald Trump n’y sont pas allés de « main morte », c’est le mensonge et la fausse nouvelle au format industriel. Qu’on en juge sur pièces. La palme de cette capacité à redoubler la réalité des faits d’une construction factice, invitant les masses à adhérer à une « post-vérité », revient incontestablement à Kellyane Conway, la conseillère à la Maison-Blanche de Donald Trump (...)

L’emprise sur les opinions publiques passe par le truchement de ces réalités alternatives dont le foisonnement semble n’avoir jamais été aussi grand qu’aujourd’hui. C’est précisément en ce point que les « réflexions d’un historien sur les fausses nouvelles de la guerre » se révèlent lumineuses. Ce serait une bien étrange erreur politique de ne considérer les fausses nouvelles que comme des erreurs ou des impostures liées à des personnes. (...)

D’une part, les fausses nouvelles sont entendues d’une partie de la population, là où elles sont attendues. Ce sont des illusions fabriquées par des spécialistes des relations publiques en politique qui fournissent les « légendes » espérées par les auditeurs de leur camp. D’autre part, la valeur d’un message dépend, dans notre société, de l’effet qu’il produit, la logique d’audimat chère à Pierre Bourdieu, et de ce fait les fake news, ont plus d’impact que les informations vérifiées. L’information est un miroir des valeurs sociales. Pour accroître son taux d’audience, les fake news sont une valeur plus sûre que la vérité.

Marc Bloch nous montre que pour qu’une légende, une fausse nouvelle naisse, se propage et s’amplifie, il est nécessaire qu’une première condition soit remplie : « trouver dans la société où elle se répand un bouillon de culture favorable. (...) " (...)

Les exagérations et les fake news du camp trumpiste ne sont pas une erreur de l’histoire, une grossière bavure de la civilisation américaine, un mensonge politique incarné par un répugnant affairiste, mais le symptôme des représentations collectives nourries à la sève des agitations fascistes du siècle dernier qui, aujourd’hui, font retour. Mais c’est une autre histoire...