Alors que toutes les diplomaties se focalisent sur l’accès aux terres rares, d’autres métaux s’avèrent tout aussi critiques pour la transition énergétique et la révolution numérique. Le cuivre notamment s’impose comme le métal stratégique des prochaines années, d’autant qu’il pourrait venir à manquer.
Après des mois de tensions, beaucoup veulent y voir une trêve. La Chine a annoncé dimanche 9 novembre la suspension de l’interdiction d’exportation du germanium, du gallium et de l’antimoine vers les États-Unis. Cette levée des restrictions sera maintenue jusqu’au 26 novembre 2026, comme l’ont précisé les autorités chinoises afin de bien signifier que les hostilités peuvent reprendre à tout moment.
Car c’est bien une nouvelle guerre des métaux, même si elle reste de faible intensité, qui est en cours. Même s’ils se limitent à ces moments, ces combats pour le contrôle, voire l’accaparement, de certains minerais et de certains métaux interviennent à chaque grande rupture technologique, à chaque grand changement dans le monde.
Après avoir fermé les yeux sur les dévastations écologiques qu’implique l’accès à ces matières premières, ainsi que sur les guerres que leur contrôle peut engendrer, l’Occident prend la mesure de sa vulnérabilité par rapport à ces productions qu’il considérait comme acquises. Brusquement, il découvre qu’il a besoin de terres rares, de cuivre, de cobalt, d’étain, d’acier, d’aluminium pour poursuivre sa transition énergétique et sa révolution technologique dans le numérique.
La course pour s’assurer un approvisionnement sûr en matériaux critiques et stratégiques est lancée partout dans le monde. L’administration Trump pousse à la réouverture de mines sur tout son territoire. Elle prend des participations directes dans les groupes miniers jugés stratégiques, comme dans le gisement de Mountain Pass, la seule mine de terres rares aux États-Unis.
En France, les dirigeants redécouvrent la qualité des études du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) dont ils avaient oublié jusqu’à l’existence ces dernières années. (...)
Tout allait au mieux dans le monde de la globalisation heureuse jusqu’à l’accession de Xi Jinping à la présidence de la Chine en 2013. L’Occident a alors pris conscience de sa situation de dépendance : sans bruit, le pays s’était construit un réseau serré d’accès miniers dans le monde et avait acquis un quasi-monopole sur le raffinage de plusieurs minerais essentiels. Et Pékin était désormais bien décidé à exploiter cet avantage. (...)
L’acier chinois représente aujourd’hui plus de la moitié de la production mondiale. Mais le temps des grands équipements, de la construction des grandes infrastructures est achevé en Chine : la demande intérieure est inférieure à l’offre. Mais plutôt que de s’attaquer aux surcapacités, d’adapter ses outils de production, Pékin a choisi d’inonder le marché mondial de l’acier, en cassant les prix en deçà des coûts de production. La tonne d’acier chinois est parfois proposée à des prix inférieurs à celui de la tonne de minerai de fer. (...)
Ce dumping rendu possible grâce aux aides d’État chinoises est en train de faire des ravages dans la sidérurgie mondiale. Les États-Unis y ont répondu en imposant 50 % de droits de douane sur les importations sidérurgiques afin de protéger leur industrie. Début octobre, après plus de dix-huit mois de négociations, la Commission européenne a annoncé une augmentation des droits de douane de 25 % à 50 % sur les importations sidérurgiques et une limitation de volume à 10 %.
Mais ces mesures arrivent bien tard. Le secteur sidérurgique européen est au bord de l’effondrement. (...)
Des mines en voie d’épuisement
Même si l’électrification des usages ne va pas au rythme espéré par les scientifiques, elle est malgré tout en cours. (...)
À ce stade, la technologie la plus répandue est celle des batteries lithium-ion. Depuis plusieurs années, les États et les groupes miniers visent ce minerai critique partout dans le monde. (...)
La Chine, pendant des années, a constitué des stocks immenses de cuivre pour sécuriser ses approvisionnements, certains de ces stocks servant même de contre-garantie dans des opérations financières. Et elle n’a pas l’intention de lâcher son emprise.
Car nombre de grands gisements en exploitation depuis des décennies au Chili, en Australie, au Canada, en Russie, en Indonésie sont en voie d’épuisement. (...)
Pendant ce temps, la demande ne cesse d’augmenter. Et le monde risque de se retrouver en déficit structurel. (...)
Le renouveau de l’étain (...)
Cet appétit renouvelé pour les métaux est lourd de tensions et de menaces. Car dans leur course effrénée pour prendre le contrôle de minerais critiques et stratégiques, il y a fort à craindre que les États envoient par-dessus bord toute autre considération, qu’elle soit écologique, diplomatique, territoriale, culturelle, pour ne viser qu’un objectif : assurer coûte que coûte leurs approvisionnements pour conforter leur puissance technologique et géopolitique.