
En Espagne, à l’approche de la haute saison, des manifestations ont eu lieu dans de nombreuses villes contre le sur-tourisme, qui engendre pollution, nuisances et exclusion des locaux. La presse indépendante fait écho de ces problématiques brûlantes.
Chaque jour, Barcelone accueille des dizaines de milliers de touristes. L’année dernière, 15 millions de voyageurs ont visité la capitale catalane. « C’est l’une des villes au monde qui a le plus souffert de la surpopulation touristique », éclaire El Salto. Et l’augmentation du prix des logements n’est pas la seule conséquence, explique le média. (...)
Ce phénomène ne touche pas que la ville catalane. Partout en Espagne, à l’approche de l’été et donc de la saison touristique, des voix se sont élevées contre le sur-tourisme et ses conséquences. elDiario.es s’est rendu à Palma, sur l’île de Majorque, où « le mouvement des touristes qui vont et viennent est constant ». Et tous les visiteurs ne dorment pas dans des hébergements légaux : au moins 37,6% des résidences touristiques sont louées « illégalement, sans disposer des permis nécessaires ».
Réponses inégales et manque de moyens
Pour les locaux, la situation est devenue « insupportable ». Un habitant de Palma raconte : « J’ai dû vendre mon appartement, j’habitais au dixième étage et tous les jours, quatre ou cinq touristes montaient simultanément dans l’ascenseur. Lorsqu’il tombait en panne, nous devions donc marcher jusqu’en haut. Sur le toit, quinze ou vingt personnes faisaient la fête, de jour comme de nuit. Nous, les voisins, étions scandalisés, mais d’autres propriétaires préféraient continuer à louer leurs appartements aux touristes. »
Les Baléares disposent de peu de moyens pour lutter contre ces locations lucratives, mais illégales. (...)
Le 6 juillet, une manifestation a eu lieu à Barcelone, faisant écho aux luttes ailleurs dans le pays — des grandes villes aux îles, en passant par les zones côtières —, pour demander un changement radical de modèle. Les organisations à l’origine de la mobilisation demandent d’augmenter la taxe de séjour, la fin de la publicité pour du tourisme de masse, ou encore la limitation des permis pour les hébergements touristiques. (...)
Mais les réponses varient selon les régions. Alors que « le gouvernement andalou s’attend à 21,5 millions de visites malgré la lassitude sociale », titre le média espagnol, et que des villes comme Malaga et Cadix se sont elles aussi largement mobilisées contre la tourisification et pour le droit au logement, la région ne semble pas s’intéresser au problème. (...)
« Le tourisme de masse est devenu un monstre »
Les voix espagnoles résonnent avec celles d’autres pays. En Italie, Il Manifesto parle des lacs lombards et de leurs flots de touristes qui « perturbe[nt] la vie et l’écosystème délicat des petites communes ». Les voitures envahissent les villages, la pollution, les problèmes de gestion des déchets et l’augmentation des microplastiques dans l’eau des lacs viennent s’ajouter aux hausses de prix et aux nuisances pour les locaux. Les communes perdent des habitants. (...)
En mars, le correspondant Europe du journal britannique The Guardian se penchait sur les stratégies des grandes villes européennes contre le sur-tourisme. « Le tourisme de masse détruit notre ville », raconte avoir entendu maintes fois Jon Henley. Le journaliste écrit : « C’est un refrain que l’on entend dans les villes historiques d’Europe, de Prague à Barcelone, d’Athènes à Amsterdam. Le tourisme de masse, encouragé par des conseils municipaux avides d’argent depuis la crise de 2008 et alimenté par des vols bon marché et des locations de chambres en ligne, est devenu un monstre. » (...)