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L’antisémitisme est l’ennemi de l’anticolonialisme
#antisemitisme #colonialisme #FrantzFanon
Article mis en ligne le 2 novembre 2023

Frantz Fanon était un militant noir, écrivain, médecin anti-colonialiste. Né en Martinique et mort prématurément, il a pris parti dans les combats héroïques de son époque. Résistant pendant la seconde guerre mondiale, il rejoint les indépendantistes pendant la guerre d’Algérie. Il fut aussi psychiatre, métier qui l’a amené à analyser les traumatismes intérieurs provoqués par la colonisation. Il laisse derrière lui plusieurs ouvrages de référence sur le colonialisme et le racisme, notamment « Les Damnés de la terre ».

Frantz Fanon écrivait : « De prime abord, il peut sembler étonnant que l’attitude de l’antisémite s’apparente à celle du négrophobe. C’est mon professeur de philosophie, d’origine antillaise, qui me le rappelait un jour : “Quand vous entendez dire du mal des Juifs, dressez l’oreille, on parle de vous.” Et je pensais qu’il avait raison universellement, entendant par-là que j’étais responsable dans mon corps et dans mon âme, du sort réservé à mon frère. Depuis lors, j’ai compris qu’il voulait tout simplement dire : un antisémite est forcément négrophobe. »

Lundi 30 octobre au Daghestan, une République de la Fédération de Russie, une « chasse aux juifs » s’est organisée dans un aéroport et plusieurs hôtels, après la rumeur de l’atterrissage d’un avion israélien. Les antisémites prétendaient agir au nom de la cause palestinienne. En France et ailleurs, la parole anti-juive se libère également sur fond d’atrocités commises à Gaza.

Rappelons-le autant qu’il le faut : l’antisémitisme est incompatible avec l’anticolonialisme. (...)

L’antisémitisme est un racisme européen pluriséculaire. Il s’agit d’un racisme parmi d’autres, mais pas comme les autres : la figure du juif a la particularité d’être construite, par les antisémites, comme dominante en secret. La figure du juif est, dans l’Europe médiévale, la figure par excellence de l’altérité, symbole de l’étranger apportant la corruption, le malheur, la maladie. Le juif ne mérite pas d’être défendu car il est coupable par nature, il est indéfendable.

Ainsi, au Moyen-Âge, les juifs sont persécutés, accusés d’empoisonner les puits, de répandre les épidémies comme la peste, puis torturés par l’Inquisition. En Europe de l’Est, ils subissent des pogroms, véritables défoulements racistes collectifs qui conduisent à des massacres. Les fantasmes judéophobes sont alimentés par des théories complotistes, comme le fameux « Protocole des sages de Sion » écrit en réalité par la police politique du Tsar pour accréditer l’hypothèse d’une « conspiration israélite ». Aujourd’hui encore ce texte alimente les délires des négationnistes.

Au XIXème siècle, l’antisémitisme est un mal répandu y compris à gauche (...)

Un siècle plus tard, l’affaire Dreyfus (1894-1906) bouleverse la société française. Un capitaine juif est accusé à tort de trahison. (...)

Les anti-dreyfusards vont former les rangs réactionnaires, pré-fascisants, partisans d’un nationalisme du sang, d’un « nationalisme intégral » (Maurras). Il existe même à l’Assemblée un « parti anti-juifs ». L’antisémitisme est alors qualifié de « socialisme des imbéciles » par le socialiste allemand Bebel. À partir de Dreyfus, la gauche commence à comprendre que l’antisémitisme est un leurre et un poison. (...)

Quelques décennies plus tard, la France va collaborer étroitement avec l’occupant nazi et même anticiper ses demandes, notamment lors de la rafle du Vel’d’Hiv : la police française arrête et déporte des milliers de juifs et juives, y compris des enfants, pour le compte du Troisième Reich. Des hauts fonctionnaires et des intellectuels français sont animés d’un antisémitisme enragé, et le traduisent en acte.

Après-guerre, l’antisémitisme est d’avantage camouflé, après l’horreur des camps de la mort, mais il ne disparaît pas totalement. On le retrouve dans les rangs des néo-nazis, des Poujadistes ou même du côté du Front National, créé dans les années 1970 par des fripouilles nostalgiques du pétainisme, dont Jean-Marie Le Pen. Ce vieil antisémitisme ne disparaîtra jamais totalement, et s’il se cache, il resurgit par vagues, que ce soit sur le plan des idées avec la négation du génocide nazi, ou que ce soit en actes à travers des attentats, des profanations, des crimes. Lors de la campagne présidentielle 2022, le candidat Eric Zemmour a même tenu des propos ouvertement révisionnistes et s’est entouré de néo-nazis, tout en étant massivement médiatisé.

Le gouvernement n’aide pas à installer un climat serein, et en premier lieu Emmanuel Macron qui citait Maurras et rendait hommage au Maréchal Pétain en 2018 ou qui nommait Gérald Darmanin Ministre de l’Intérieur en 2020, ancien proche de l’Action Française, une organisation royaliste et antisémite. En 2023, ce sont ces personnes, de Macron à Zemmour, qui s’inscrivent dans la filiation de l’antisémitisme français, qui font bloc derrière Israël.

Répétons-le : l’antisémitisme est l’ennemi absolu des mobilisations pour la paix. Il est fondamentalement incompatible avec le combat pour la liberté des peuples. (...)

Méditons toujours l’adresse de Frantz Fanon envers les peuples colonisés : « Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille, on parle de vous ».

Ne confondez jamais la communauté juive et l’État colonial. Depuis trois semaines, partout dans le monde, des juifs et juives protestent contre les bombardements israéliens et sont même parfois arrêtés pour cela. En France les collectifs Tsedek et UJFP sont en première ligne des mobilisations de soutien à la Palestine.

Les propagandistes pro-israéliens tentent d’entretenir volontairement la confusion. (...)