
De retour d’un séjour en Israël, Bertrand Bloch, enseignant retraité de l’Université de Bordeaux, témoigne d’une situation difficile deux mois après l’attaque du Hamas et la riposte d’Israël sur la bande de Gaza. Il renvoie dos-à-dos les idéologues des deux camps, le Hamas comme l’extrême-droite israélienne, et appelle le camp de la paix à un sursaut.
L’horreur des massacres du Hamas a créé une onde de choc et une instabilité en Israël, dans un pays où chacun connait quelqu’un qui est mort, ou otage, ou rappelé comme réserviste. A l’évidence, pour les Israéliens, le 7 octobre est le départ d’un nouveau monde très incertain avec toutes ses douleurs et ses deuils, ses angoisses et ses inconnues.
De même, y répond le calvaire de la population palestinienne dont je ne peux témoigner directement, mais dont les images déchirantes nous parviennent en continu.
L’affrontement et la mort sont présents dans chacun des deux camps (...)
Ces dernières années, et tout particulièrement depuis les attaques du Hamas du 7 octobre, toutes les personnes concernées directement ou indirectement par ce conflit sont sommées de prendre parti et de se ranger derrière l’un des deux camps aux contours plus ou moins bien définis. D’un côté Israël (juifs, sionistes, anti-antisémites, oppresseurs, colonialistes, Occident, extrême-droite), de l’autre les Palestiniens (musulmans, arabes, oppressés, antisionistes, antisémites, extrême-gauche, islamistes).
Dans les deux camps, des appels parfois intéressés et peu légitimes, voire contradictoires et manipulateurs, soufflent sur les braises du conflit qui depuis plusieurs dizaines d’années domine la vie et le destin de quinze millions de personnes entre la mer Méditerranée et le Jourdain. Ceux qui veulent l’affrontement et la mort sont présents dans chacun des deux camps et chez leurs soutiens.
L’Un doit écraser l’Autre pour en finir (...)
comme dans une tragédie antique, chez les Israéliens comme chez les Palestiniens, ces deux extrémismes, unis dans la mort et la confrontation sans espoir et sans fin, se nourrissent l’un de l’autre. Ils ont réussi à occulter et à écraser les efforts, devenus inaudibles, de ceux, qui militent et se battent pour une solution d’avenir et de paix acceptables par chacun des deux peuples. (...)
Les combats pour la paix
Le 7 octobre, ses conséquences actuelles et l’instabilité politique qui en résulte, légitiment encore plus ces combats pour la paix qui viennent de plusieurs secteurs des sociétés israéliennes et palestiniennes. Ils s’inscrivent dans le droit fil d’un des derniers propos d’Yitzhak Rabin : « Il faut combattre le terrorisme comme s’il n’y avait pas de processus de paix, et il faut négocier la paix comme s’il n’y avait pas de terrorisme. » (...)
Un avenir de paix contre les vents mauvais
Aujourd’hui est le temps, de la mort, du deuil et de la radicalité pour les Israéliens et les Palestiniens. Cela m’a frappé dans mes discussions, personne n’est en mesure d’exprimer sereinement un avenir, ni même y penser.
Il faut néanmoins croire en cet avenir et soutenir ces élans, non comme un mantra ou une nostalgie passéiste, mais comme une réalité qui a failli exister du fait des accords d’Oslo. (...)
Les deux peuples doivent imposer rapidement des leaders nouveaux qui auront le courage, le charisme et la vision pour tourner le dos à ces tentations mortelles, à cette négation de l’autre. Ils devront recréer confiance et crédibilité sur la base des demandes de chacun : pour Israël, avant tout, une sécurité permanente basée sur la paix (comme cela a été obtenu avec l’Egypte et la Jordanie), pour les Palestiniens, une reconnaissance de leurs aspirations nationales et une possibilité de développement économique.
Qui se lèvera pour la paix ? (...)
Dans un contexte délétère et angoissant en France comme ailleurs, nous devons apporter des motifs d’espoir et de paix. Est-il si inconcevable d’imaginer, demain, en France, ailleurs en Occident, au Proche-Orient, en Israël et chez les Palestiniens et dans les pays arabes, des expressions publiques fortes et des manifestations associant drapeaux israélien et palestinien pour tenter de faire valoir une paix négociée respectueuse des deux peuples ?