
Quel est le point commun entre une éolienne, la houle océanique et une éruption volcanique ? Toutes trois sont émettrices d’infrasons, des sons dont la fréquence est inférieure à 20 hertz. Ces ondes sonores, réputées à tort inaudibles, peuvent faire plusieurs fois le tour de la Terre et intéressent autant les physiciens que les médecins. Enquête.
(...) Une onde acoustique est une onde de pression, une onde mécanique donc2, qui se propage de manière longitudinale en faisant osciller les molécules d’oxygène et d’azote de l’air, créant de légères surpressions et dépressions à son passage. La longueur d’onde correspond à la distance entre deux maximums (ou entre deux minimums) de pression. Or plus la fréquence d’une onde sonore est petite, comme c’est le cas dans les très basses fréquences, plus sa longueur d’onde est grande et plus l’onde voyagera loin. Elle aura également tendance à être « aveugle » aux obstacles plus petits que sa longueur d’onde. Inversement, plus une fréquence est haute (sons plus aigus), plus sa longueur d’onde sera petite, et plus rapidement elle sera absorbée par l’atmosphère et affectée par les obstacles. (...)
Des sources naturelles et industrielles
« Tous les phénomènes géophysiques sont émetteurs d’infrasons : éruptions volcaniques, séismes, chutes de météorites, tornades, éclairs, aurores boréales… », confirme Roberto Sabatini, enseignant-chercheur au Laboratoire de mécanique des fluides et d’acoustique de Lyon3. (...)
À noter que si la fréquence et la longueur d’onde sont liées, l’intensité des ondes sonores produites dépend de la nature et de la puissance de la source.
Tous les phénomènes géophysiques sont émetteurs d’infrasons : éruptions volcaniques, séismes, chutes de météorites, tornades, éclairs, aurores boréales… (...)
« On sait aujourd’hui que de nombreuses sources artificielles produisent des ondes acoustiques infrasonores : les explosions nucléaires ou chimiques, le bang des avions supersoniques, mais aussi tous types d’installations industrielles susceptibles de mettre l’air en mouvement », poursuit Roberto Sabatini. (...)
Les installations industrielles susceptibles de mettre de l’air en mouvement - pompes, systèmes de ventilation, turbines, et autres éoliennes -, sont potentiellement émettrices d’infrasons.
Brisons tout de suite un mythe : il n’y a pas que les éléphants ou les baleines qui entendent les infrasons. Réputées inaudibles par l’humain, les ondes infrasonores sont bel et bien perceptibles par chacun d’entre nous, à condition d’atteindre des niveaux d’intensité suffisamment forts (...)
si les infrasons constituent un outil de recherche prometteur pour les physiciens spécialistes de l’atmosphère, ils génèrent aussi des inquiétudes sur la terre ferme, alors que la multiplication des sources industrielles potentiellement émettrices – et notamment l’essor de l’éolien – pose la question de la perception par l’humain des ondes infrasonores, mais aussi celle de leurs effets potentiels sur la santé.
A Marseille, une cabine infrasonore inédite (...)
À ce jour, il existe peu d’études sur la perception des infrasons par l’être humain, mais il est au moins un fait formellement établi par les scientifiques : contrairement à ce que leur nom laisse supposer (le préfixe « infra » prend pour référence l’audition humaine), les infrasons peuvent bel et bien être perçus par l’oreille humaine. (...)
Dans la gamme infrasonore, il suffit de quelques décibels à peine pour passer d’un son à peine audible à un son perçu comme très fort. (...)
Des personnes plus sensibles que d’autres (...)
Le médecin prévoit, dans un deuxième volet de l’étude, de se focaliser sur les personnes plus sensibles aux infrasons, celles dont on pense que le seuil d’audibilité est un peu plus bas que la moyenne de la population, et qui ressentent une gêne quand d’autres n’entendent tout simplement rien (...)
Mieux prédire le bruit des installations industrielles (...)
« Les infrasons suscitent beaucoup de fantasmes. On ne les voit pas, la plupart du temps on ne les entend pas, et leur propagation sur de longues distances rend l’identification de leur source parfois difficile, résume David Ecotière. Mais s’il s’avérait qu’ils ont un impact sur la santé, alors la législation sur le bruit et les normes en vigueur devraient fortement évoluer. »