
En réponse aux propos tenus par Emmanuel Macron le 30 octobre, lors de l’inauguration de la Cité internationale de la langue française à Villers-Cotterêts, un collectif d’universitaires, de politiques, d’artistes, d’autrices et de militants féministes exprime, dans une tribune au « Monde », leur peine et leur indignation.
(...) "De la peine pour vous, d’abord, qui passez pour une personne intelligente et bien éduquée. Vous ignorez pourtant que le masculin et le neutre ont des rôles différents, et que le neutre n’est pas fait – sauf exceptions – pour parler des personnes. Lorsque le masculin est employé pour parler des femmes, c’est bien plutôt parce qu’il « fait l’homme », le dominant, ce qu’on l’a encouragé à faire, en France, depuis le XVIIe siècle. Espérons que cela est expliqué dans la nouvelle Cité internationale de la langue française.
Vous ignorez que nous ne cherchons pas à rendre la langue illisible, ce que la lecture de livres publiés en langage égalitaire vous aurait appris, mais à rendre les femmes visibles, lorsqu’il est question d’elles aussi. D’où le « Bonjour à tous et à toutes » que nous exigeons, s’il y a des femmes dans l’assistance. Nous cherchons également à donner au genre féminin le même poids qu’à son homologue, par le retour en grâce des accords de proximité ou de logique, qui n’ont jamais rendu Lafayette ou Racine illisibles.
Un système qui profite aux hommes
Vous ignorez que nous n’ajoutons pas des points au milieu des mots, mais à leur fin, pour signifier qu’ils sont porteurs du masculin et du féminin – puisque ce sont les finales qui sont genrées. Et que les spécialistes préconisent un seul point pour les mots au pluriel : « commerçant·es ». (...)
Vous ignorez que les graphies testées pour réaliser cette abréviation ne sont pas des « choses », mais des signes, et que ces signes (le trait d’union, la barre oblique, le point médian…) ont pour mission de remplacer les parenthèses inaugurées par le ministère de l’intérieur il y a une quarantaine d’années, à l’image du « né(e) le » qui figure sur votre carte d’identité – si elle date d’avant le printemps 2021. Faut-il préciser que ces signes ne se prononcent pas ? (...) "