Le parti allemand d’extrême droite "Alternative für Deutschland" (AfD) est au cœur d’une polémique après la distribution par une de ses branches locales d’un tract électoral en forme de billet d’avion "pour migrant illégal". En pleine campagne pour les législatives de février, cette distribution a entraîné l’ouverture d’une enquête.
(...) Sur le billet, face recto, figure une date de départ : le 23 février 2025, soit le jour des élections législatives partielles en Allemagne, de "8 à 18h00", horaires d’ouverture des bureaux de vote. Au verso du billet, l’AfD préconise aussi "l’expulsion de toutes les personnes obligées de quitter le territoire".
Certains de ces prospectus ont été retrouvés dans des boîtes aux lettres de personnes d’origines étrangères. Un utilisateur du réseau X qui se présente comme "citoyen allemand d’origine turque" a dit avoir trouvé le faux billet dans sa boîte aux lettres et ressenti un "sentiment très étrange". "Mon nom de famille était probablement déterminant pour cette action", a-t-il ajouté.
Marc Bernhard, député de l’AfD au Bundestag de Karlsruhe, a confirmé à la presse locale que jusqu’à 30 000 tracts avaient été imprimés, mais nié qu’ils visaient des noms à consonance étrangère sur les boîtes aux lettres. (...)
Enquête ouverte
En pleine campagne politique avant ce scrutin majeur, l’AfD aura réussi à faire parler de lui. Certains observateurs ont vu dans l’horaire de fermeture, 18h, un code néo-nazi basé sur les initiales d’Adolf Hitler, le A et le H étant les 1ère et 8e lettres de l’alphabet (soit 1=A et 8=H), une accusation rejetée par la section locale.
La campagne a suscité une vive réaction en Allemagne, les critiques comparant cette opération aux billets aller simple pour Jérusalem distribués aux Juifs par les nazis dans les années 1930. (...)
L’immigration au cœur de la campagne
Le parti de gauche radicale Die Linke a qualifié cette initiative de "méthode fasciste pour inciter à la haine", accusant l’AfD d’avoir ciblé dans sa distribution les personnes issues de l’immigration.
Créditée de la deuxième place dans les sondages nationaux, l’AfD prône ouvertement une "remigration" des étrangers non désirables (c’est à dire un retour dans leur pays), mesure que le parti a intégrée à son programme électoral. (...)
La migration est au cœur de la campagne électorale allemande, alors que ce thème s’est hissé au sommet du débat politique en Allemagne ces dernières années. L’attaque au couteau de Solingen en août 2024 a marqué un véritable tournant qui s’est rapidement traduit par un durcissement de la politique migratoire du pays. En décembre, l’attentat contre un marché de Noël dans la ville de Magdebourg peu avant les fêtes de fin d’année, a encore renforcé cette tendance.
Le chef de l’opposition allemande, Friedrich Merz, chef du parti chrétien-démocrate CDU, propose même de retirer la nationalité allemande aux personnes naturalisées et reconnues coupables de crimes.
Dans le même temps, depuis la chute de Bachar al-Assad, le débat sur l’expulsion et le retour des réfugiés syriens ne désenfle pas, alors que près d’un million de Syriens vivent en Allemagne - ce qui en fait le pays européen qui a accueilli le plus grand nombre de ressortissants syriens. (...)