
Nouvelle année. Au soir du 31 décembre et sous une pluie glaciale et battante, les artistes interprétaient comme ils l’ont pu pour les besoins des dites festivités, organisées comme tous les ans par la municipalité d’Athènes. Sous une Acropole alors arrosée, l’image retransmise en simultané par les télévisions grecques convient bien à la situation du pays. Pétards mouillés. Pourtant tout le monde dans la mesure du possible, a pu enfin souffler un peu durant cette coupure calendaire des rythmes et des... arythmies du pays réel. Bonne année 2019 !
Entre Noël et le Nouvel an, le climat ainsi surfait était un peu partout à la fête, les enfants, les enfants ont particulièrement apprécié. Il faut dire que les enfants en Grèce deviennent de plus en plus rares, d’après les récentes enquêtes démographiques reproduites par la presse du moment en guise de... bonne année, l’indice conjoncturel de fécondité a subi un effondrement sans précédant après 1981, pour se situer en 2016 à environ 1,3 enfant par femme.
Ainsi, les personnes âgées de plus de 65 ans représentent actuellement près du 25% de la population, et le nombre des enfants de moins de 15 ans, s’élèvent seulement à un petit 14%. C’est n’est pas glorieux et surtout, une telle “bombe démographique” signifie d’après les spécialistes que la population du pays (10 millions actuellement) diminuera de presque un million dans près 30 ans, quotidien “Kathimeriní” du 31 décembre 2018.
Alors, ni forces vives et à terme encore moins nation... si rien ne change. Les éditorialistes dignes de ce nom à l’instar de l’universitaire, philosophe et théologien orthodoxe Chrístos Yannarás, tirent donc la sonnette d’alarme. “Les prévisions pour 2019 ne permettent guère l’optimisme. Le seul et alors unique espoir tient alors de la chimère, de la croyance en cette possibilité de ‘surprise’, car chaque société, même plongée dans le déclin le plus profond peut ainsi contre toute espérance, donner naissance à sa propre mutation radicale.” “Il n’est certainement pas prudent que de miser sur le moins probable, sur ce qui est tout simplement souhaitable. Sauf que le désir commun, ou celui partagé par le plus grand nombre, est généralement porteur de cet élan issu de la surprise. (...)
L’autre quasi-nouveauté du moment tient d’une certaine massification constante de la pratique religieuse, en Grèce, et même à Athènes. Certes, ce phénomène ne peut pas être quantifié de manière exhaustive, sauf qu’il suffit de se rendre à l’église et d’observer. Au moment même où une partie du haut prélat semble accepter la mise en cause de la position de l’Église et plus généralement de l’Orthodoxie, le bas clergé et les laïques des paroisses résistent, persistent, psalmodient et signent. Une mise en cause, signalons-le, en réalité guerre ouverte initiée par les tenants de la mondialisation et leurs serviteurs locaux, à savoir et entre autres, le “gouvernement” Tsípras.
Sauf qu’en ville, comme partout ailleurs, l’Église est de plus en plus présente sur le terrain social, et aussi spirituel à défaut peut-être d’idéologie politique adéquate. (...)
Près d’un tiers de la population se débrouille comme on dit, entre les fonctionnaires aux revenus réguliers, puis ceux, acteurs d’une parfois nouvelle économie, partiellement immergée... et quelquefois même criminelle.
Indifférents désormais au sort des autres, car 70% de la population est paupérisée et près de la moitié des Grecs sont alors pauvres, ces rescapés ou “renouvelés” de la crise et par la crise, clientèle des partis comprise, font et feront leur vie, car de toute manière... il n’y aurait plus autre chose à réaliser. Et c’est alors la partie visible de l’ensemble mai qui ne le représente plus depuis la longue agonie de la classe moyenne. (...)
Au village, le voisin Nikos et aussi cousin un peu lointain, me raconte comment et combien la commune se dépeuple, elle a perdu plus du tiers de sa population depuis les années dites de la crise.
“Les jeunes sont partis en Allemagne et les vieux donc... ils meurent. Ce n’est plus rentable du tout que de travailler la terre, toutes les terres du village finissent par être exploitées par deux ou au mieux, par trois familles, lesquelles ont alors les moyens et pour tout dire, disposent de la mécanisation nécessaire et de pointe pour y parvenir. Nous travaillons déjà et nous travaillerions davantage pour eux ; comme nos ancêtres il y a plus d’un siècle. Nous sommes les abandonnés des politiciens, le Parlement devrait un jour... sauter, sans blague.” (...)

Les élections législatives auront lieu cette année certes, le système politique survivra, et peut-être que lors des élections d’après, d’autres mouvements pourront voir le jour, authentiques, radicaux, émanant du pays réel, pour que l’unique espoir puisse ainsi tenir de la chimère en cette possibilité de surprise. Et à commencer par la dénonciation des accords avec la Troïka et évidemment par la sortie de la Grèce de l’Union européenne, c’est un minimum et ce n’est qu’un début car cette voie est bien longue et difficile. (...)
En attendant et en préparant le miracle, nous admirons autant tout l’éclat des animaux adespotes qui sont autant des nôtres. Bonne année, espoir et vérité !