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Mediapart
Déplacés de Gaza : « C’est comme si nous étions dans un film qui ne s’arrête jamais »
#israel #palestine #Hamas #Cisjordanie #Gaza
Article mis en ligne le 9 août 2024

Après dix mois à se déplacer dans la bande de Gaza, Mohamed et Hamza sont épuisés. Pour Mediapart, les deux Gazaouis se confient sur leur parcours, leur quotidien depuis le 7 octobre et la désolation qu’ils observent autour d’eux.

(...) Hamza et Mohamed ont raconté à Mediapart ce qu’ils voient autour d’eux au quotidien. Les conséquences du manque d’hygiène sur les personnes fragiles, l’état mental de celles et ceux qui errent aujourd’hui dans l’enclave, déboussolé·es par les ordres de déplacement incessants. (...)

Ils racontent aussi le sentiment des personnes qui ont décidé de ne plus bouger, car trop fatiguées. Celles qui préfèrent mourir plutôt que d’emballer une énième fois leurs affaires pour aller dans une zone définie comme « sûre » par l’armée israélienne. Car, comme beaucoup d’ONG le décrivent, « il n’y a plus de zone sûre à Gaza » depuis cette guerre qui a balayé toutes les règles du droit international et, dans le même temps, les maigres repères que pouvaient encore avoir les habitant·es.
« Le plus douloureux, c’est de voir les familles »

« Je peux donner un mot pour décrire la situation actuelle : c’est vraiment une reproduction de la Nakba [l’exode forcé de centaines de milliers de Palestiniens en 1948 – ndlr], une catastrophe, explique Hamza. C’est comme si nous étions dans un film qui ne s’arrête jamais. Tout est détruit, les universités, les écoles, les hôpitaux, tout. » L’étudiant en anglais originaire de Gaza City est réfugié avec sa famille depuis quelques mois dans la maison de son grand-père à Deir al-Balah. Avant cela, il a été déplacé une dizaine de fois dans le sud de la bande de Gaza.

« Cette maison fait deux étages, j’habite au premier avec des amis et de la famille proche », décrit le jeune homme de 23 ans au téléphone. Derrière sa voix, un bruit de moteur aigu gronde de manière constante : « C’est un drone israélien qui ne quitte jamais le ciel de Gaza. » Hamza n’a pas été blessé jusqu’à aujourd’hui. « Lorsque nous entendons une explosion au loin, nous faisons attention, nous restons chez nous, explique-t-il. Mais si cette maison se fait bombarder, cinquante personnes seront tuées, dont trente enfants. »

« Certains commencent à parler seuls dans la rue. D’autres prétendent qu’ils sont forts, mais ce n’est pas la réalité. Ils sont tous brisés. » (...)

Vous ne pouvez pas imaginer à quel point la souffrance des gens est grande », continue Mohamed.

Selon le médecin, la situation est d’autant plus dure pour les femmes et les personnes âgées, « à cause de la dignité ». (...)

Résignation (...)

« Les gens deviennent fous, explique Mohamed, certains commencent à parler seuls dans la rue. D’autres prétendent qu’ils sont forts, mais ce n’est pas la réalité. Ils sont tous brisés. » Il continue : « Les gens commencent à dire qu’ils préfèrent mourir, que l’armée n’a qu’à faire ce qu’elle veut. Certaines personnes n’ont pas bougé lors du dernier ordre d’évacuation, parce qu’elles ne savent pas où aller. Alors elles préfèrent rester là où elles sont. Je suis sûr que plusieurs d’entre elles sont mortes dans ces blocs. »

« On se demande quand cela va s’arrêter, quand ce “film” va finir, reprend Hamza. Parfois, nous allons sur la plage pour voir le coucher de soleil et souffler un peu. Je ne sais pas comment le décrire, mais c’est plus que simplement regarder un coucher de soleil magnifique. On y voit comme des funérailles pour un proche. »

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