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Dé-domestiquons-nous, ou l’art de ne pas être gouvernés
#Etat #libertés #organisation #democratie
Article mis en ligne le 15 août 2024
dernière modification le 4 août 2024

La forme-Etat autoritaire, les piteuses présidentielles à venir le prouvent, nous domine et ruine la démocratie. Est-ce une fatalité ? Non. Et des anthropologues comme James Scott l’ont montré. Alors, faisons revivre en nous les nomades, les cueilleurs, les pirates, en sollicitant le déjà-là des sociabilités quotidiennes, associatives, et de l’infinité de façons qu’il y a de ne pas être gouvernés.

« Un rapport universitaire pointe une nouvelle année de recul de la démocratie libérale », rapporte dans un article récent Fabien Escalona affirmant, à partir des données du projet V-Dem (Varieties of Democracy), que « en 2020, 68 % de la population mondiale vivait dans des régimes autoritaires, et 34 % dans des pays où le degré d’autoritarisme, tous types de régimes confondus, s’est récemment aggravé » -on est priés par Manu-la-Poigne de ne pas reconnaitre la France dans ce dernier cas de figure, et si vous n’êtes pas contents, allez vivre en dictature.

Ah bah ! On n’est pas bien, là, décontractés des libertés publiques ? Et on manifestera quand on aura envie de manifester –enfin, pas après 18 heures et pas n’importe où, après avoir rempli son attestation, prévenu la préfecture et les renseignement territoriaux, et à condition que les flics n’en décident pas autrement et ne jugent pas plus opportun d’envoyer tout le monde en cellule ou à l’hosto. Et pendant qu’une partie de la « gauche », que j’appellerai plus volontiers le centre-droit, drague les déçus du vallso-macronisme sur le terrain boueux du « c’est-moi-le-plus-Républicain », la droite officielle se pare sans scrupules aucun des apparats d’un néo-pétainisme ma foi du plus bel effet.

Bon. Il est facile, et c’est hélas très répandu, la focalisation du débat « démocratique » sur les égos boursouflés des « présidentialisables » le prouve, de voir une fatalité dans cet autoritarisme imposé d’en haut par une poignée de messieurs en costume ou en uniforme kaki, selon le cas : après tout, n’est-ce pas l’histoire de l’Humanité ? « L’homme est un loup pour l’homme », sans chef charismatique rien ne va et, soupire Macron, « rien ne se fait », et il a donc bien fallu, dès l’aube de la civilisation, que des gens prennent sur eux pour nous apprendre un peu comment vivre ensemble.

Et ceci, après tout, est vrai : nous avons été domestiqués –comme les loups devenus des chiens (seuls les chats étant restés des chats, envers et contre tout). Mais ceci ne s’est pas fait sans heurts, et c’est un processus qui, nous le savons aujourd’hui, ne s’est fait que progressivement, et somme toute très récemment : ainsi, il y a encore 400 ans –autant dire une paille-, les deux tiers de l’humanité vivaient encore hors de toute forme-Etat –et ma foi, il semble qu’ils n’en aient pas été plus malheureux.

Un livre qui retrace par le menu la lente et douloureuse histoire de la domestication, plus ou moins volontaire, d’homo sapiens par les ancêtres des gens en costume et uniforme kaki

Cette information, je la tiens d’un livre capital, paru en poche il y a peu aux éditions de la Découverte : Homo Domesticus, une histoire profonde des premiers Etats, de James C. Scott, l’un des plus grands noms (avec David Graeber, prématurément décédé) de l’anthropologie anglo-saxonne. Un livre qui retrace par le menu la lente et douloureuse histoire de la domestication, plus ou moins volontaire, d’homo sapiens par les ancêtres des gens en costume et uniforme kaki. (...)