
Un pays tout entier, le Danemark, un länder allemand, des dizaines de communes, comme Lyon, la troisième ville de France… Lentement mais sûrement, les collectivités basculent vers Linux, LibreOffice et autres NextCloud. Le but est économique, mais aussi d’asseoir sa souveraineté numérique et d’en finir avec la dictature des GAFAM.
De la théorie à la pratique. Dès fin septembre, la moitié des 60 000 fonctionnaires du länder allemand du Schleswig-Holstein, près de trois millions d’habitants, frontalier du Danemark, n’utiliseront plus aucune solution Microsoft sur leur lieu de travail. « Chez nous, Teams, c’est fini ! », s’enthousiasme Dirk Schrödter, ministre régional de la numérisation, en référence à l’une des applications phare de Microsoft. « Les développements géopolitiques de ces derniers mois (guerre en Ukraine, au Proche-Orient, retour de Donald Trump à la Maison Blanche…) ont renforcé l’intérêt pour le chemin que nous avons pris, surtout en Europe », assure-t-il.
Des millions d’euros économisés
Les fonctionnaires vont donc abandonner progressivement tout l’écosystème Microsoft, comme les logiciels Word et Excel, remplacés par LibreOffice, puis la messagerie Outlook au profit d’Open-Xchange et de Thunderbird. Sharepoint doit également laisser place à la solution nextcloud. Et ce n’est pas tout. Grâce à ces solutions alternatives, le länder ambitionne également d’économiser des dizaines de millions d’euros. « Au lieu d’investir dans des droits de licence et de financer ainsi l’avance technologique des fournisseurs non européens par des fonds publics, nous soutenons le développement de l’économie numérique nationale », se félicite M. Schrödter. (...)
« L’un des atouts du libre, se réjouit Olivier Luthier, DSI à la mairie de Fontaine, c’est l’effervescence de sa communauté. C’est le terrain de jeu favori des étudiants à travers le monde, ce qui contribue à la sécurisation des logiciels, parce que c’est du code lisible. Il existe des bases de données communautaires pour filtrer internet, ce qui nous intéresse pour nos écoles élémentaires. Et ça ne coûte rien aux mairies ! » Déjà la moitié des 800 postes utilisateurs sont sous Linux dans le parc de la mairie de Fontaine. (...)
Entré en vigueur en avril 2024, un récent règlement européen, l’« Interoperable Europe Act » pourrait accélérer le mouvement. Il favorise la coopération entre les administrations publiques de l’Union européenne et encourage l’usage des logiciels libres. (...)
Ville de Lyon : un cas d’école et un choix politique
Dans la 3ème ville de France, on a réfléchi et bâti pendant trois ans un modèle alternatif à Microsoft. La majeure partie du parc informatique de la mairie de Lyon aura migré d’ici mars prochain. Souveraineté et sobriété : tels sont les deux enjeux majeurs que le maire écologiste de Lyon, Grégory Doucet, avait fixé à son exécutif, et qui ont guidé la démarche : « L’idée était de s’éloigner le plus possible des GAFAM, se souvient Jean-Marie Seguret, directeur des systèmes d’information à la mairie de Lyon, à cause à la fois d’un risque de fuite des données et au nom de la lutte contre l’évasion fiscale et le monopole des géants américains du cloud. Par ailleurs, les suites logicielles nous poussaient à une obsolescence technique et à un remplacement excessif du matériel. » Or, selon l’ADEME, le hardware représente à lui seul plus de 80% de l’empreinte carbone numérique d’une organisation. (...)