Deux anciens collaborateurs du maire d’Issy-les-Moulineaux l’accusent de harcèlement et d’agressions sexuelles. Mediapart diffuse plusieurs échanges dans lesquels André Santini sollicite des caresses. Sollicité, l’ex-ministre conteste tout comportement inadapté.

84 ans, il est l’un des derniers tauliers de la « droite Pasqua » dans les Hauts-de-Seine. Ancien conseiller général, député, vice-président de l’Assemblée nationale, ministre de Jacques Chirac puis de Nicolas Sarkozy, André Santini s’apprête à fêter ses quarante-cinq ans de mandat à la tête de la mairie d’Issy-les-Moulineaux, le 3 février. Des célébrations qui risquent d’être ternies par les accusations qui visent l’édile, qui contrôle aussi le puissant Syndicat des eaux d’Île-de-France (Sedif) depuis quatre décennies.

Depuis 2022, deux anciens collaborateurs de son cabinet dénoncent avoir subi du harcèlement sexuel et des agressions de la part d’André Santini pendant plusieurs années, comme l’a révélé Le Monde. Les deux jeunes hommes, qui avaient été recrutés comme huissiers (agents chargés de la gestion des visiteurs) par le maire, ont entrepris de l’enregistrer en 2021 et 2022 avant de porter plainte auprès du parquet de Nanterre, qui a ouvert une information judiciaire en octobre 2024. (...)

Marc indique s’être décidé à enregistrer l’élu à son insu après que ce dernier aurait tenté de l’embrasser en le caressant dans un ascenseur, à l’été 2021. À chaque fois, les échanges ont lieu dans l’imposant bureau du maire à l’hôtel de ville, où l’agent se trouve seul debout face à l’élu, qui est lui assis dans un fauteuil. (...)

Dans leurs plaintes, les deux agents, qui n’avaient pas de diplôme ni de bagage professionnel avant de rejoindre le cabinet du maire, dénoncent le « système d’emprise » qu’aurait mis en place ce dernier, en vue d’obtenir des faveurs sexuelles en échange d’avantages statutaires, puis d’obtenir le silence des intéressés. (...)

Un roitelet dans sa mairie

Outre les accusations contestées de faits à caractère sexuel, les plaintes des deux anciens collaborateurs du maire permettent de lever le voile sur une partie du fonctionnement d’un élu se comportant comme un roitelet dans sa mairie. Les deux huissiers décrivent en effet le quotidien d’une municipalité où les intérêts publics et privés semblent totalement imbriqués.

Détaillant les tâches qui lui étaient assignées, Marc explique qu’il était par exemple chargé des achats réguliers des cigares du maire, ainsi que de l’entretien de l’humidificateur allant avec, ou de l’acquisition d’un coffre-fort pour stocker des armes, de ses courses à la boucherie comme de l’entretien de son aquarium. Interrogé sur ces surprenantes missions, l’avocat d’André Santini n’a pas répondu à nos questions. (...)

Pendant le confinement, les chauffeurs d’André Santini – eux aussi payés sur fonds publics – ont été mobilisés pour préparer ses petits-déjeuners, comme le montrent des SMS ainsi qu’une note visée par la secrétaire personnelle de l’élu. Cette dernière, employée de la mairie, accompagnait aussi André Santini dans ses rendez-vous médicaux, sans que personne n’y trouve à redire. Quand il était à l’intérieur, le jeune huissier sans expérience professionnelle pensait qu’un tel fonctionnement était « normal ».