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Mediapart
À Saint-Denis, les JO entravent les accès à l’hôpital
#JO2024 #hopitalDelafontaine
Article mis en ligne le 25 juillet 2024
dernière modification le 23 juillet 2024

Plusieurs bretelles des autoroutes A86 et A1 à Saint-Denis seront fermées jusqu’au 11 septembre. Ces restrictions pénalisent le personnel de l’hôpital Delafontaine, qui s’inquiète aussi pour les patients, en particulier les femmes enceintes d’une des plus grandes maternités d’Île-de-France.

ÉdithÉdith Rain a eu une mauvaise surprise le lundi 15 juillet en se rendant à son travail. La sortie 3 de l’autoroute A1 qui mène directement devant l’hôpital Delafontaine et qu’elle emprunte chaque jour est désormais réservée aux véhicules accrédités pour les Jeux olympiques et paralympiques (JOP). Un damier est peint au sol et un panneau marque l’interdiction.

La sage-femme, qui travaille à la maternité de l’hôpital, tombe des nues : « Je me suis retrouvée devant le fait accompli, personne n’était au courant. » Comme elle, de nombreux soignants et travailleurs de l’hôpital l’apprennent le jour même.

Pourtant, la sortie 3 n’est pas la seule concernée à Saint-Denis. Un arrêté préfectoral datant du 9 juillet établit la liste des modifications des conditions de circulation au niveau des bretelles d’autoroute de l’A1, de l’A86 et de l’A104. En tout, dans la ville la plus peuplée de Seine-Saint-Denis, six bretelles de sortie d’autoroute et trois d’entrée sont réservées aux véhicules accrédités pour les JOP ou carrément fermées de la mi-juillet au 11 septembre. (...)

Ces fermetures viennent s’ajouter aux restrictions de circulation sur les voies dites olympiques, réservées aux véhicules des JOP sur des portions de ces autoroutes. En tout, 185 kilomètres de voies sont réservés aux JOP en région parisienne.

« On était au courant pour les voies olympiques, il y avait eu de la communication dessus, mais pour ces bretelles, rien », appuie la sage-femme. Même la direction de l’hôpital Delafontaine n’était pas au courant. (...)

Le personnel est aussi surpris de la fermeture de la bretelle 3, pourtant loin des infrastructures olympiques. Contactée par Mediapart, la préfecture de police de Paris confirme que « ces éléments ont été portés à la connaissance de la direction de l’hôpital le 18 juillet ». Elle justifie cette fermeture par un risque d’accidents accru par la présence des voies olympiques. À cet endroit, la ligne réservée aux véhicules accrédités est basculée de la troisième file à la première, les véhicules communs voulant emprunter la sortie devront donc la traverser. Toutefois, la préfecture promet que « le dispositif sera levé entre les Jeux olympiques et les Jeux paralympiques ».

Des temps de trajet doublés (...)

En plus du désagrément causé au personnel de l’hôpital, qui compte la plus grande maternité francilienne, l’inquiétude des soignant·es se porte aussi sur l’accessibilité pour les patient·es, en particulier les femmes enceintes : « Je ne sais pas comment peut faire une personne qui vient de l’A1, avec une femme sur le point d’accoucher », souffle Inès, qui rappelle que l’hôpital est déjà mal indiqué et que les GPS ne prennent pour l’instant pas en compte les fermetures de bretelles.

Si les voies olympiques et certaines dessertes restent accessibles pour les ambulances privées et celles du Smur, les entrées fermées et les embouteillages viennent aussi compliquer le parcours des ambulanciers. Mathias Wargon, chef du service des urgences de l’hôpital, n’est pas rassuré. (...)

En plus du désagrément causé au personnel de l’hôpital, qui compte la plus grande maternité francilienne, l’inquiétude des soignant·es se porte aussi sur l’accessibilité pour les patient·es, en particulier les femmes enceintes : « Je ne sais pas comment peut faire une personne qui vient de l’A1, avec une femme sur le point d’accoucher », souffle Inès, qui rappelle que l’hôpital est déjà mal indiqué et que les GPS ne prennent pour l’instant pas en compte les fermetures de bretelles.

Si les voies olympiques et certaines dessertes restent accessibles pour les ambulances privées et celles du Smur, les entrées fermées et les embouteillages viennent aussi compliquer le parcours des ambulanciers. Mathias Wargon, chef du service des urgences de l’hôpital, n’est pas rassuré. (...)

Des jeux pour la télé, pas pour les habitants

La frustration des soignant·es est d’autant plus prégnante qu’elle advient dans un climat déjà dégradé : une accumulation de fatigue et de surcharge de travail dues à un manque de moyens et de personnel structurel à l’hôpital public, et une pression accrue en cet été olympique. « Pour nous, c’est vraiment un manque de considération de la préfecture, des pouvoirs publics. On a l’impression d’être des quantités négligeables », s’agace Édith Rain, qui rappelle que la maternité ne sera même pas concernée par les primes versées par l’État pendant les JOP.

Mathias Wargon, lui, voit dans tout ce dispositif une forme de privatisation de l’espace public. « Tout est tourné à la fois vers la sécurité et vers la famille olympique. On a l’impression que les Jeux, c’est pour la télé et pas pour les habitants », assène le médecin. (...)

« Il n’y a pas eu un geste pour nous, le Comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojo) ne nous a jamais contactés, regrette Mathias Wargon. On est un peu les larbins du truc. On est là pour faire notre taff, pas la fête. »