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Mediapart
Violences sexuelles : 13 femmes accusent Gérard Depardieu
#Depardieu #femmes #agressionssexuelles
Article mis en ligne le 12 avril 2023
dernière modification le 11 avril 2023

« Tu t’appelles Gérard Depardieu. Tu es mis en examen pour viols et agressions sexuelles. […] Tu dégoûtes, mais le pire, c’est que les Françaises et Français sont encore de ton côté. » Sur son compte Instagram, la réalisatrice Andréa Bescond, très engagée dans la lutte contre les violences sexuelles, a pris l’habitude d’interpeller le grand public sur des affaires #MeToo.

Le 17 novembre 2022, elle a consacré l’une de ses vignettes à la plainte de l’actrice Charlotte Arnould, qui vaut à Gérard Depardieu une mise en examen pour « viols ». Dans les commentaires, suivent des récits directs, parfois précis et datés ; des confidences d’amies ou de collègues. « C’est la seule personnalité publique sur laquelle j’ai reçu autant de témoignages, il y en avait une demi-douzaine, beaucoup d’expériences de plateaux », raconte Andréa Bescond.

Deux ans plus tôt, les récits ont aussi afflué lorsque le collectif « Paye ton tournage » – qui dénonce les violences sexuelles et sexistes dans le cinéma – a publié un appel à témoignages concernant « un acteur très connu », après avoir reçu deux alertes sur Depardieu. « À chaque fois, le mode opératoire était très reconnaissable », se souvient la cofondatrice, Alice Godart. (...)

Mediapart a mené sa propre enquête. Outre la plainte de Charlotte Arnould, nous avons recueilli treize témoignages de femmes affirmant avoir subi des gestes ou propos sexuels inappropriés du célèbre acteur, de gravité différente, sur le tournage de onze films ou séries sortis entre 2004 et 2022 ou dans des lieux extérieurs ; mais aussi les récits de nombreux témoins. Tous ne figurent pas dans notre article.

Trois de ces femmes ont apporté leur témoignage à la justice, mais aucune n’a porté plainte. Les unes ont renoncé, les autres n’y ont même pas songé. En cause, le sentiment que leur parole pèserait peu face au monument du cinéma français. Et qu’elle pourrait même signer la fin de leur carrière.

Au fil des récits, la scène semble se répéter. Elles sont comédiennes, maquilleuses ou techniciennes. Elles affirment avoir subi une main dans leur culotte, à leur entrejambe, à leurs fesses ou bien sur leur poitrine ; des propos sexuels obscènes ; parfois des grognements insistants. Suivis, souvent, de rires sur le plateau. Et cette même phrase, lorsque certaines se sont plaintes : « Oh ça va, c’est Gérard ! »

Au-delà des violences sexuelles et sexistes qu’ils dénoncent, ces récits interrogent la complaisance dont aurait bénéficié le comédien de 74 ans sur les plateaux de cinéma et l’absence de réaction des équipes de production. Sollicité par Mediapart, Gérard Depardieu n’a pas souhaité nous rencontrer ni répondre à nos questions écrites (...)

Une actrice a saisi la justice en mars (...)

Huit ans après, l’actrice garde en mémoire ce tournage qui l’a « traumatisée ». « J’ai été agressée dans un environnement de travail, pas dans un coin isolé, mais sur le plateau. Il y avait tellement de témoins oculaires, y compris le réalisateur, qui était juste devant nous ! Personne n’a rien dit. Même quand je me suis plainte et que je me faisais crier dessus. Un silence de mort. »

Quelques années après le tournage, la comédienne avait consulté une avocate, mais elle n’était pas allée plus loin, pensant que les faits étaient prescrits. En mars, après notre interview, elle a décidé de transmettre son témoignage à la justice française, « pour aider Charlotte Arnould » : « Je veux faire ma part en tant que femme du même secteur et refuser de faire partie du problème en permettant un tel comportement en gardant le silence. »

Depardieu recadré par le réalisateur Fabien Onteniente (...)

sur le film Turf, « deux figurantes » sont venues le voir. « L’une était en pleurs et se plaignait de mains aux fesses. Voir ce visage d’une fille qui venait faire de la figuration et était pleine d’espoir, ça m’a ému et mis hors de moi. Donc je suis allé engueuler Depardieu, j’ai monté le volume, je lui ai dit : “Tu ne recommences pas ça, c’est fini ! Tu te comportes bien”, et ça s’est arrêté net. Il était tout penaud, comme un enfant qui aurait fait une bêtise. » (...)