
Les lignes qui suivent sont extraites du Dictionnaire de la lepénisation des esprits, paru en 1998, puis réédité en mai 2002 aux Éditions L’esprit frappeur. C’est avec une profonde tristesse que nous constatons, plus de dix ans après, que non seulement il n’a pas perdu de sa pertinence, mais qu’il est en un sens encore plus vrai aujourd’hui, au lendemain d’un premier tour présidentiel qui a vu un n-ième triomphe, éminemment prévisible, pour des extrêmes-droites ouvertement racistes. Nous vous laissons juges de l’actualité de cette analyse - et, il faut le craindre, de son avenir, tant il est vrai que l’histoire, quand on refuse d’en tirer des leçons, tend à se répéter.
(...) les régions les plus touchées par le vote FN ne sont pas celles où il y a le plus d’immigrés ou d’étrangers, mais souvent celles où les élus ont rivalisé de démagogie et de xénophobie avec le FN.
Au cours des années 1980 et 1990 notamment, il est devenu de plus en plus fréquent de rendre les étrangers responsables du chômage, de la délinquance et des déficits publics, de prophétiser l’invasion, la fin de la République ou le « choc des cultures », de fantasmer sur l’Afrique, la polygamie, le foulard islamique ou les « banlieues-ghettos », et de défendre « l’identité nationale », le « droit du sang » ou la « préférence nationale ». Ce sont des Présidents de la République et des Premiers Ministres, toutes tendances confondues, qui ont appelé à « remplacer la main d’oeuvre immigrée par une main d’oeuvre nationale », et qui ont parlé d’« invasion », de « seuil de tolérance dépassé », d’« overdose d’immigrés » ou de « bonnes questions du Front National ». L’homme qui s’est plaint du bruit et de l’odeur des immigrés a fini à l’Élysée [1].
Cette banalisation des stéréotypes racistes ou xénophobes doit beaucoup, également, aux faiseurs d’opinion que sont les grands médias. (...)