
De retour à Athènes depuis les pays centraux du continent, on sent alors le futur si proche et saisissant, s’agissant bien entendu s’un bien autre futur qui s’y prépare. Déjà que les grands médias continentaux, ainsi que le meilleur de la doxa ambiante ignorent désormais “nos” affaires, disons grecques. Le temps ne ment pas du côté d’Athènes, un policier vient de se suicider ce lundi dans les toilettes de son aéroport international, tandis que sur certaines affiches on peut lire à propos d’un spectacle déjà désuet car datant de plusieurs moins : “C’est en tant que pays que je meurs. Le passé, le présent et le futur d’une société qui s’effondre”. Ce qui n’est pas de l’avis de tout le monde, et fort heureusement.
Anestis Tsoukarakis, lieutenant-colonel de l’armée de terre et Président du syndicat de sa branche assure dans un entretien accordé au “Quotidien des Rédacteurs” du 25-26 mai, que son combat “est celui de la justice, de la démocratie et de la dignité aux côtés des autres composantes de la société et non pas contre elles”.
Car l’effondrement menace désormais presque tout le monde, cet effondrement sélectif mais toutefois massif, qui se poursuit et qui se radicalise, au point même de devenir chronique, pour ne pas dire achronique, voire dans un sens et par une certaine dérision, utopique. En pleine mauvaise utopie alors, les habitants de ce pays, 80% d’entre eux plus précisément, sont sur le point de sombrer dans une litote inspirée d’une “décroissance” implacable car socialement sélective.
Jacques Sapir me disait y a déjà plusieurs mois que l’Europe du Sud, et très probablement la Grèce, se verraient imposer cette nouvelle “territorialisation de l’effondrement” et de la “paupérisation durable”, un peu à la manière des espaces des pays ex-communistes en Europe de l’Est, et à défaut de changer de “gouvernance”. (...)
Dans le domaine économique déjà, les pays d’Europe du Nord, agissent et de manière décisive pour ainsi modifier l’architecture de l’Europe, et ceci, en renversant complètement les données de notre pays, lequel avait fait alors de l’intégration au sein de l’Union européenne et de la zone euro un enjeu national majeur”. Nous voilà, j’y ajouterais à “l’Europe de l’endroit”, puis, à celle “de l’envers”... mais loin, très loin du Pacifique et de ses fosses les plus profondes de la Terre... à part la financiarisation des échanges peut-être.
Il n’y a que la presse disons “autorisée” comme Ta Nea de ce lundi 27 mai, qui en première page, estime que Wolfgang Schäuble, “serait en train de changer d’avis pour enfin se montrer favorable à l’octroi par la Banque allemande d’investissement Kfw aux pays du Sud, d’emprunts bon marché”, et nous, nous ne savons plus quoi dire à propos du ministre fédéral des Finances, tellement nous sommes fatigués, vraiment. (...)
Et sur le terrain, les désocialisations s’accélèrent, ainsi qu’une certaine perte d’influence de Syriza liée à mon avis à son imprécision, voire à son impréparation face aux apories, déclarées telle une guerre, depuis cet autre futur si proche. J’ai tiré la sonnette d’alarme à ce propos, y compris derrière les micros de la radio 105,5 (de Syriza) il y a deux semaines. Face à ces désocialisations les citoyens, les riverains et les habitants réagissent pourtant. Comme par la création de ce nouvel espace autogéré dans le quartier, d’après les affiches que l’on voit partout sur les murs : “Voisins et voisines. Un nouvel espace de résistance, de solidarité et de lutte, ouvre ses portes. Pour que nous puissions couvrir nos besoins collectivement, pour faire baisser le coût de la vie, pour créer une sociabilité nouvelle dans notre quartier”. (...)
Dans la même synchronie, un nouvel appel renouvelé à la jeunesse “en vue de créer une organisation au niveau local” de Syriza, s’inspire volontairement des symboles des années 1940, liés à la résistance, drôle d’époque, la nôtre en tout cas ! (...)
Ce qui est plus grave c’est que l’art et la création artistique et audiovisuelle peuvent ou “doivent” aussi mourir autrement. Par mort subite ou par arrêt cardiaque provoqué. Depuis plus d’une semaine, les rumeurs les plus folles, courent sur la fin et qui serait très proche de l’audiovisuel publique, ainsi que du Centre National du Cinéma. Cette même menace plane sur la Cinémathèque qui lui est liée, et où, dans son programme en ce moment, on y trouve l’excellent documentairede Vassilis Loules “Baisers aux enfants”, s’agissant de l’histoire de cinq enfants juifs, rescapés de la mort. Par les temps qui courent, leur mémoire vivante est plus qu’essentielle je dirais. (...)
La semaine dernière, des policiers ont interpellé dans une rue d’Athènes, les membres du groupe suédois The Shrine, au motif qu’ils auraient de cheveux trop longs. Voilà comment la crise et le Troïkanisme, sauraient également produire à part le chômage et les suicides, du burlesque authentique. Heureusement dans un sens car il faut parfois en rire de tout, et surtout heureusement parce que la Police, ou plus précisément son principal syndicat, proteste à Chalkidiki, de l’usage politique sont elle sert, contre la volonté des habitants qui refusent toujours la présence des exploitants d’or dans leur forêt. “Lorsque le problème est politique, entre les citoyens, une communauté et le pouvoir central, il va falloir alors arbitrer autrement que par l’usage de la police. La moitié de nos hommes sur place, servent à garder les installations de la compagnie Eldorado Gold”, d’après la presse de la semaine dernière comme To Pontiki, notre hebdomadairepolitique et satirique. (...)
Pour ce qui est du blog justement, et après plus de dix-huit mois d’existence, le temps d’un premier bilan est arrivé. Étant strictement seul à en assurer la conception, les reportages, la rédaction ainsi que le (presque car impossible) suivi des commentaires, sauf l’énorme travail en informatique assuré de manière bénévole jusque là par mon ami Kendavros, je considère que son concept doit en quelque sorte évoluer, et que le système des donations, d’ailleurs en perte de vitesse et souvent aléatoire par essence, n’assure en effet qu’une petite survie certes salvatrice et je suis fort reconnaissant aux amis et lecteurs de ce blog. Sauf que la “survie durable” soit dit en passant, ne favorise pas la réflexion de fond et la bonne suite dans les idées non plus. Enfin, je remarque que souvent, les billets de mon blog sont repris sans autorisation de ma part ici ou là à travers le web et ceci même, par certains sites qui se font financer par les internautes, ce qui au-delà des considérations disons mercantiles, pose un problème éthique évidement bien connu car difficile à résoudre. (...)