
Le gouvernement veut fusionner l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) avec l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Au risque de mettre en péril la sûreté nucléaire en France, dénoncent salariés et observateurs.
Personne ne s’y attendait. Quand j’ai demandé à mes collègues de l’intersyndicale ce qu’ils en pensaient, personne n’a répondu. Tous étaient assommés. » Puis, très vite, un sentiment de colère et d’injustice a émergé. « Qu’est-ce qu’on nous reproche ? Rien. Aucun argument précis pour justifier cette sanction ultime : vous disparaissez. » (...)
Cette décision a vraisemblablement été prise pendant le Conseil de politique nucléaire du vendredi 3 février. (...)
Et pas question de traîner dans la mise en œuvre de cette réorganisation : le président de l’ASN Bernard Doroszczuk, le directeur général de l’IRSN Jean-Christophe Niel et l’administrateur général du CEA François Jacq devront rendre une première feuille de route dès le lundi 20 février. (...)
Actuellement, l’IRSN est un établissement public à caractère industriel et commercial (Epic) fondé par un décret de 2002. Outre ses activités de recherche, il aide l’ASN à prendre ses décisions en lui apportant les éléments techniques nécessaires. (...)
« On sent régulièrement une forme d’agacement de l’ASN par rapport à l’autonomie de réflexion de l’IRSN », observe Yves Marignac, expert nucléaire à l’association négaWatt.
D’ailleurs, contrairement à l’IRSN, scandalisé, et au CEA, qui n’a pas encore communiqué, l’ASN a salué l’annonce du gouvernement. (...)
Le manque de regard transversal inquiète
Alors, cette réorganisation permettra-t-elle de « garantir un haut niveau d’exigences en matière de sûreté », comme l’assure le gouvernement dans son communiqué ? Non, répondent en chœur les personnes interrogées par Reporterre. (...)
si l’IRSN intégrait l’ASN, c’est tout le processus de fabrication des décisions relatives à la sûreté nucléaire qui risque de devenir opaque. (...)
Cette réorganisation interroge jusque dans l’entourage d’Emmanuel Macron, puisque le parti En Commun, cofondé par l’ancienne ministre de la Transition écologique Barbara Pompili et qui réunit des parlementaires de la majorité, a dit « s’inquiéter » du démantèlement de l’IRSN dans un communiqué du 14 février. (...)
Pour M. Marignac, l’objectif du gouvernement n’est pas tant d’améliorer la sûreté, que de l’affaiblir pour accélérer la mise en œuvre des chantiers annoncés par le président de la République (...)
Quoi qu’il en soit, les salariés de l’institut n’ont pas l’intention de se laisser faire. Ils ont publié une pétition sur Change.org, qui rassemblait plus de 3 700 signatures le 15 février au soir. Ils ont également contacté les parlementaires spécialisés dans les dossiers énergétiques pour les appeler à refuser la réforme.