
À tort ou à raison, certains jours ont vocation à figurer comme des dates importantes de notre histoire politique et sociale. S’il n’est pas question pour moi de sombrer dans l’histoire évènementielle, je pense néanmoins que le mardi 7 mars devra être marqué d’une pierre blanche. Retour sur une belle journée pour la démocratie sociale et une triste nuit pour la démocratie parlementaire.
Tout avait commencé par une mobilisation sociale historique. Des millions de personnes ont défilé dans les rues, partout en France, dans l’Hexagone et dans les territoires ultra-marins, pour dire non à la réforme des retraites défendue par Emmanuel Macron, son gouvernement et les Républicains. Au cœur de la manifestation parisienne, j’ai vu des femmes et des hommes déterminés à se battre pour obtenir le retrait d’un projet de loi qui va contraindre des millions de travailleuses et de travailleurs à travailler deux ans plus. J’ai également discuté avec des primomanifestants, ulcérés par le coup de force intenté par le gouvernement contre les velléités exprimées par le peuple.
Pour tout vous dire, cela faisait bien longtemps que je n’avais pas ressenti une telle puissance dans nos rangs, nous qui sommes, il faut l’admettre, trop souvent relégués du côté des vaincus de l’Histoire. Je n’ai pas la prétention de parler au nom de tous les parlementaires de gauche, mais je pense que ce soulèvement populaire nous a donné énormément de force pour mener la bataille au Parlement. Dans ces occasions, nous ne sommes pas 15, 50, ou 75 dans l’hémicycle. Nous sommes des millions. Nous sommes un peuple uni.
Hélas, ce moment historique a rapidement été gâché par des pratiques politiciennes avilissantes pour notre démocratie parlementaire.
À l’Assemblée nationale d’abord, où le Garde des sceaux n’a rien trouvé de mieux à faire que d’asséner deux bras d’honneur en direction d’Olivier Marleix, président du groupe Les Républicains, sous prétexte que ce dernier lui aurait manqué de respect, en lui rappelant simplement sa mise en examen. Il aura fallu une suspension de séance, puis les remontrances de la Présidente de l’Assemblée nationale pour que Monsieur Dupont-Moretti daigne s’excuser pour ce geste indigne de sa fonction, lequel aurait certainement contraint le ministre à démissionner séance tenante dans n’importe quelle autre démocratie parlementaire.
Puis le pire s’est produit au Sénat en pleine nuit, durant l’examen de l’article 7 de la réforme des retraites, celui-là même qui intronise le recul de l’âge de départ à la retraite à 64 ans.
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