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Six femmes sur dix cibles de violences sexuelles au travail : plongée dans une association qui les défend
Article mis en ligne le 6 octobre 2020

(...) Une jeune illustratrice témoigne, de manière anonyme, de son quotidien de travail dans le secteur très masculin du jeu vidéo : « C’est banal d’entendre, de la part de mes collègues : "S’il y a un personnage féminin dans le jeu, faut que j’ai envie de la baiser" ou "Vas-y, dessine-lui une bouche de suceuse". Ça brouille les limites. Si bien qu’au quotidien, un collègue va se permettre de dire à une autre en jupe courte : "Ça me donne envie de mettre ma tête entre tes cuisses." Cette pression constante nous met dans un état d’hypervigilance stressant et fatigant. »

Une discussion s’engage ensuite, animée par une association : l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT). C’est elle qui a été choisie par le CNC pour former les professionnels à la prévention des violences. Le projet du CNC est ambitieux [1] : il conditionne l’octroi d’aides financières publiques aux créateurs au fait qu’ils suivent la formation dispensée par l’AVFT. Le témoignage de l’actrice Adèle Haenel [2] et d’autres femmes victimes dans le milieu du cinéma aurait-il été entendu ?

« Notre objectif est qu’une procédure judiciaire bénéficie aussi à toutes les autres femmes victimes »

Habituellement, l’AVFT est plus loin des projecteurs. Ce qu’accomplit l’association depuis 1985 [3], dans l’ombre, n’en est pas moins considérable. La formation et la sensibilisation contre les violences sexuelles et sexistes au travail constituent l’un des axes de l’action de l’AVFT. L’autre est la défense des victimes grâce à un outil principal : le droit. L’association intervient à leurs côtés auprès des employeurs, de l’inspection du travail, du parquet ou de la police pour que leurs droits soient respectés.

En Europe, six femmes sur dix sont confrontées à des violences sexuelles au cours de leur vie professionnelle (...)

Blagues sexistes et humiliations publiques

Au point de départ de l’action de l’AVFT : le coup de téléphone ou le mail d’une femme victime [5]. L’association, qui compte sept employées, des stagiaires et des bénévoles, reçoit 300 sollicitations par an. Ces saisines ont triplé en cinq ans. À chaque rentrée de septembre, les appels explosent. « À l’occasion de vacances, d’arrêts maladie ou maternité, les femmes prennent du recul et conscience des violences qu’elles subissent », constate Marilyn Baldeck. Dans les bureaux parisiens de l’association, Léa Scarpel, juriste chargée de mission, tient ce matin la permanence téléphonique. Elle reçoit justement l’appel d’une directrice de salle de spectacle « que le confinement a sauvée », selon cette dernière. Pendant longtemps persuadée « qu’il faut tout donner pour le travail », elle a subi sans broncher les blagues sexistes, regards déplacés, propos sur ses tenues et humiliations publiques de la part de son supérieur. Confinée, la professionnelle a dénoncé le harceleur à leur employeur, qui lui a rétorqué qu’elle faisait mal son travail. Écoeurée, elle appelle l’AVFT pour chercher conseil.