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Sea Watch : "Nous ne devrions même pas exister"
Article mis en ligne le 9 juin 2020

L’ONG allemande Sea Watch qui mène des opérations de sauvetage en Mer Méditerranée retrace ses cinq années d’existence dans une exposition à Francfort.

DW : le Sea-Watch 3 avait été place sous quarantaine fin février, début mars. Est-ce que le navire a repris la mer depuis ?

Jelka Kretschmar : Non. Le bateau se trouvait au port quand les mesures de confinement dues au coronavirus ont été annoncées. Il n’a donc plus été possible pour nous d’être en service ou même de faire venir des équipages à cause des restrictions de voyage sur les vols en avion. Nous avons adapté notre action, parce que nous devons nous assurer que nous pouvons protéger notre équipage et les personnes secourues en cas d’opération de sauvetage. Actuellement, une équipe est en quarantaine et se prépare à être déployée. En ce moment, être activiste demande énormément de temps parce qu’il faut se mettre en quarantaine avant et probablement après chaque opération en mer.

Que pouvez-vous nous dire de la situation actuelle en mer ?

De ce que nous savons, rien n’a vraiment changé concernant les départs de Libye. Après tout, une pandémie ne va pas réduire les souffrances des gens. La situation dans les camps de torture libyens n’a pas changée non plus.

En d’autres termes, les gens continuent à fuir, à la seule différence que l’absence de navires civils implique que nous n’avons pas de moyens pour les secourir sur le terrain. Il y a eu beaucoup d’urgences maritimes ces dernières semaines, dont un cas pour lequel nous savons que des personnes se sont retrouvées en mer pendant au moins six jours.

Ces personnes sont soit mortes à cause de l’inaction des autorités européennes, ou ont été rapatriées de manière cordonnée de Malte vers la Libye en violation des lois internationales. Enfin, s’ajoutent au cas spécifiques que nous avons eu connaissance, les cas qui ne sont pas rapportés. (...)

Malheureusement, le sujet n’est plus intéressant pour beaucoup de personnes, bien que la situation n’a pas changée. Le taux de mortalité en Méditerranée est plus élevée qu’il y a cinq ans.

Bien évidemment, il y a toujours des rayons d’espoir, comme le fait que la région allemande de Thuringe vient tout juste d’adopter un programme d’accueil. C’est un bon signe.

Néanmoins, les politiques européennes sont devenues plus rigides et la politique d’isolement a été élargie. C’est évident quand on regarde les ressources mises à disposition la soi-disante garde côtière libyenne et cela se manifester par la criminalisation des secours en mer. (...)

Comment votre exposition au Musée des cultures du monde de Francfort peut-elle permettre au public de mieux comprendre ce qui se déroule en Méditerranée et l’importance de Sea-Watch ? (...)

Pendant cinq ans nous avons pris en charge des tâches dont nous ne devrions même pas nous occuper. Nous ne devrions même pas exister. (...)

L’exposition met en lumière nos expériences, les procédures juridiques et la manière dont on criminalise le fait de porter secours. D’un coté, nous voulons approfondir la discussion pour ceux et celles qui se confrontent déjà à ce sujet, mais nous voulons aussi ramener la discussion au sein de la société. (...)