
72 arrestations, une cinquantaines de blessés et 22 policiers hospitalisés : résultats des affrontement du 1er mai à Istanbul.
Le 1er mai en Turquie a toujours été une journée hautement symbolique car il représente une journée de lutte active depuis les années 60. Le 1er mai n’est redevenu un jour férié légal que depuis 2009 (interdit depuis 1980 et le Coup d’État militaire) et les manifestations sur la place Taksim (place centrale) ne sont ré-autorisées que depuis 2010. Malgré l’interdiction, les différents groupes politiques n’ont jamais cessés d’organiser des rassemblements non autorisés.Tout au long des années 60-70-80, les marches du 1er mai en Turquie ont été marquées par des affrontements avec les fascistes, la police et l’armée.
(...) Aujourd’hui, c’est dans un contexte politique tendu (« négociations » avec la Guerilla kurde (PKK), attaques régulières des fascistes sur l’Université d’Istanbul et d’ailleurs, politique d’austérité, répression sur les minorités ethniques) que les marches du 1er mai représentent un enjeu politique important pour l’ensemble des groupes révolutionnaires et les organisations institutionnelles de gauches, syndicales, et associatives. Alors que le gouvernement islamiste de l’AKP décide d’interdire l’accès à la Place Taksim, elle devient alors « The Place To Be ».
Reprendre la Place Taksim
Plusieurs semaines avant le 1er mai, des milliers d’affiches ont commencé à fleurir sur les murs d’Istanbul : syndicats, organisations politiques de gauche et d’extrêmes gauches, organisations étudiantes, libertaires, kurdes, féministes... Pourtant, aucune d’entre elle (excepté le TKP, Parti communiste) n’indique le lieu de rassemblement. A Istanbul, tout le monde sait pourquoi. La place Taksim a été interdite, pour raison officielle de travaux. En réalité, l’ensemble des groupes ont la ferme intention de marcher sur Taskim. C’est d’ailleurs, la grande centrale syndicale DISK (Türkiye Devrimci Isci Sendikalari Konfederasyonu – Confédération des syndicats révolutionnaires de Turquie) refusant cette régression qui appelle toutes les organisations à prendre la place de force le jour du 1er mai. (...)
Marcher sur Taksim, car Taksim est LA place centrale d’Istanbul. Ce qu’elle représente pour l’ensemble des militants est hautement symbolique : elle fait rappel à la fin de l’Empire Ottoman, mais aussi à la force de mobilisation des groupes révolutionnaires qui s’y amassaient par centaines de milliers, voir par millions. Un peu comme Bellecour ou Terreaux à Lyon, toutes les manifs doivent aujourd’hui y passer pour se rendre visibles. Au 1er mai sanglant de 1977, les groupes fascistes soutenus par la police, ont ouvert le feu sur les manifestants faisant 34 mort et une centaines de blessés. Ces derniers répondant par plusieurs jours de révoltes et de vengeance menant à l’occupation de la ville par l’armée, prémisse du coup d’État de 1980. Après cela la place est restée fermée et aucun coupable ne fût jamais traduit en justice. (...)
Ce 1er mai 2013, la Place Taksim n’a pas pu être reprise, la répression policière avec tout son attirail de dispersion des masses (en Turquie, sur les canons à eaux, pas d’économie), a tenu en échec les manifestants qui se sont reportés sur la défense de leurs quartiers. De nombreux-ses bléssé-e-s graves, beaucoup de crises cardiaques, chez les personnes âgées surtout, dû aux lacrymos. De plus, les manifestants devaient aller se faire soigner dans les hôpitaux éloignés du centre ville, puisque la police fichait systématiquement les entrées dans les urgences proches des points d’affrontements.