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Rénovation énergétique : comment passer à la vitesse supérieure ?
Article mis en ligne le 30 décembre 2019
dernière modification le 29 décembre 2019

Le bâtiment compte pour 45 % de la consommation énergétique française et plus d’un quart de nos émissions de gaz à effet de serre. Une solution existe, qui profite au climat comme aux humains : la rénovation énergétique « globale et performante ».

En 2015, la France s’est donc fixé un objectif : disposer d’un parc bâti « bas carbone », qui consomme peu, à l’horizon 2050. Ce qui signifie construire des habitats performants… et améliorer l’existant. « Pour y parvenir, il faudrait rénover 500.000 logements par an, indique Étienne Charbit, du Cler, réseau pour la transition énergétique. On en est à peine à 330.000. » Surtout, ces chiffres comptabilisent tous types de travaux de rénovation, y compris un simple changement de vitrage. Or, ces petits gestes de rénovation ne permettent pas de réduire significativement la consommation d’énergie. « Les gens raisonnent chaudière et fenêtre, alors que les postes les plus importants sont la toiture et la ventilation, explique Vincent Legrand, de l’institut négaWatt. Mais si on isole les combles sans faire l’étanchéité à l’air [c’est-à-dire sans traiter les infiltrations et les fuites d’air], on perd tout l’intérêt de l’opération. En plus, une rénovation mal faite ou incomplète peut dégrader la qualité de l’air intérieur. » Selon lui, les politiques actuelles, qui encouragent une rénovation par étapes coûteuse et inefficace, vont droit dans le mur. (...)

La solution, prônée par des organisations comme le Cler ou négaWatt, se nomme la « rénovation complète et performante » : des travaux réalisés en une seule fois, traitant autant de l’isolation de l’ensemble du bâtiment, des systèmes de chauffage et de ventilation que de l’étanchéité à l’air. D’après l’observatoire BBC, seuls 33.000 logements sont ainsi rénovés « à basse consommation » chaque année. On est donc (très) loin des 500.000 rénovations visées. « Les autorités nous répondent que ce n’est pas “massifiable”, que ça coûte trop cher, que c’est trop complexe », regrette Vincent Legrand. Pour faire mentir les Cassandre, l’institut négaWatt a développé depuis 2011 un dispositif de rénovation performante des maisons individuelles, nommé Dorémi. (...)

« On s’est concentré sur les maisons individuelles construites avant 1975, c’est-à-dire avant la première réglementation thermique, et qui sont donc les plus énergivores, explique Vincent Legrand, aujourd’hui directeur général de Dorémi. Notre but est de rendre accessible la rénovation performante à tous les ménages, sans perte de pouvoir d’achat. » Une gageure, car de tels travaux globaux coûtent en moyenne de 50.000 à 70.000 euros. Le mécanisme trouvé par les experts de Dorémi est pourtant simple : « Il s’agit de transformer les factures de chauffage, qui vont significativement diminuer, en mensualités de prêt d’un montant équivalent », dit le directeur, en étalant sur son bureau un dépliant coloré détaillant un des chantiers réalisés. (...)

Les propriétaires payaient, avant travaux, 208 € de chauffage par mois ; aujourd’hui, ils n’en payent plus que 27 €, auxquels s’ajoutent 133 € de remboursement de prêt, sur quinze ans. « Ils ont gagné 48 € par mois, mais également une maison plus confortable et plus saine, car mieux ventilée », ajoute M. Legrand.

Dans la région de Valence, où est implanté Dorémi, une vingtaine de logements ont ainsi été rénovés. (...)

« On n’a pas assez d’artisans, et ils sont ultrademandés. On a besoin de développer des formations, en lycée technique, mais aussi auprès des artisans déjà en activité » (...)

La nouvelle prime à la rénovation aurait pu permettre de corriger le tir, mais « le texte actuellement sur la table augmente le reste à charge des ménages à bas revenus, au lieu de le diminuer », dénonce Étienne Charbit.

La balle est donc dans le camp des dirigeants politiques. Dans la Drôme, Dorémi est prête. Grâce à une levée de fonds, la petite structure a démultiplié son équipe, et s’est engagée à développer la rénovation des maisons sur cinq régions, couvrant au moins 10 % de la population française.