
Les robes sombres s’amassent sur le trottoir et des chants de résistance se font entendre. Contre la réforme de la justice, une cinquantaine d’avocats, de magistrats, de greffiers mais également de surveillants pénitentiaires se sont réunis devant le Sénat ce mardi. Les élus du palais du Luxembourg se penchent ce mardi sur le projet du gouvernement. Syndicats et organisations représentatives redoutent l’adoption d’un texte à la logique comptable et attentatoire aux droits des justiciables. Chacun a son mot à dire sur le projet de loi de la garde des sceaux, mais personne ne trouve d’oreille attentive.
Avant même sa présentation en Conseil des ministres en avril, la réforme avait fait descendre entre 4 000 et 7 000 professionnels de la justice dans la rue. Sous le slogan « Justice morte », ils dénonçaient certaines mesures phares de la Chancellerie comme la suppression du juge d’instance, la création d’un tribunal départemental criminel ou encore la construction de nouvelles places de prison. Mais, malgré des inflexions du gouvernement et quelques amendements déposés par les sénateurs, l’esprit du texte demeure.
« C’est simple, nous n’avons rien obtenu depuis le début du mouvement », lance Laurence Roques, présidente du Syndicat des avocats de France (SAF). Une absence de considération pour les avocats, cristallisée par le volet pénal de la loi. « Il n’y a jamais eu de dialogue dans cette matière ! Nous avons toujours trouvé les portes de la Chancellerie fermées », argue la bâtonnière de Paris, Marie-Aimée Peyron. Le syndicat de la magistrature (SM) n’est pas en reste. Sa présidente, Katia Dubreuil, rit jaune : « Nous avons rédigé une autre réforme de la justice. Aucune de nos propositions ne figurent dans le projet du gouvernement. »
Des auditions expéditives, une attention limitée
Pas davantage de dialogue au Parlement, où les cadences imposées par la procédure accélérée sabordent les débats. (...)
« Ça va se passer comme lors de la loi asile et immigration », compare la présidente du SAF, elle poursuit avec une pointe d’amertume : « Avant même d’être auditionnés, la messe était dite, nous n’avions rien à leur apporter. » (...)
Pour l’instant, les espoirs des manifestants reposent sur la chambre haute du Parlement. Mais le risque demeure : la majorité présidentielle à la chambre basse pourrait réamender le projet pour coller à la version du gouvernement. Jacques Bigot, sénateur socialiste, met en garde : « Nous verrons bien si l’Assemblée nationale n’a qu’un but, suivre la majorité, sans consulter les professionnels… Elle devrait être attentive. »