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Orient XXI
Quand Israël créait un groupe terroriste pour semer le chaos au Liban
Article mis en ligne le 25 juin 2018
dernière modification le 23 juin 2018

Dans les années 1979-1982, le gouvernement israélien a créé au Liban une organisation qui a commis de très nombreux attentats terroristes. Dans son livre, Rise and Kill First : The Secret History of Israel’s Targeted Assassinations le chroniqueur militaire israélien Ronen Bergman revient, entre autres, sur cet épisode qui reste largement occulté.

Des choses terribles ont été faites avec le soutien de Sharon. J’ai soutenu et même participé à quelques-unes des opérations d’assassinats effectuées par Israël. Mais là nous parlons d’extermination de masse, juste pour tuer et pour semer le chaos et l’effroi chez les civils. Depuis quand envoyons-nous des ânes chargés de bombes dans des marchés pour qu’ils explosent ?

Ainsi s’exprime un agent du Mossad cité dans Rise and Kill First : The Secret History of Israel’s Targeted Assassinations, du journaliste israélien Ronen Bergman.(...)

à la fin du premier mandat de Ronald Reagan, les élus américains en étaient arrivés à accepter et à adopter les principales assertions et hypothèses qui avaient été, depuis des années, au cœur du discours israélien sur le « terrorisme ». Le « terroriste » est l’« Autre » non occidental. Il utilise des moyens mauvais et immoraux, au service de fins mauvaises et immorales. En ce sens, « le terroriste » appartient au monde pré- ou non civilisé. Par contraste, « nous » nous opposons à, condamnons et rejetons « tous les terrorismes ». Nos usages de la force sont légitimes et toujours défensifs, car ils ne viennent qu’en réponse à la « menace terroriste ».

Ce discours est de l’idéologie pure. Car de 1979 à 1983, précisément durant la période qui sépare les conférences de Jérusalem et de Washington, de très hauts responsables israéliens menèrent une campagne à large échelle d’attentats à la voiture piégée qui tua des centaines de Palestiniens et de Libanais, civils pour la plupart. Plus remarquable encore, un des objectifs de cette opération secrète était précisément de pousser l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) à recourir au « terrorisme » pour fournir à Israël la justification d’une invasion du Liban. Ces assertions ne sont pas le produit d’un esprit conspirationniste. Une description des grandes lignes de cette opération secrète a été publiée par Ronen Bergman, un journaliste israélien respecté, dans le New York Times Magazine du 23 janvier 2018(...)

Le but était de créer le chaos parmi les Palestiniens et les Syriens au Liban, sans laisser d’empreinte israélienne, pour leur donner l’impression qu’ils étaient constamment sous attaque et leur instiller un sentiment d’insécurité.

Pour y parvenir, Eitan, Ben-Gal et Dagan « recrutèrent des locaux libanais, druzes, chrétiens et musulmans chiites, qui n’aimaient pas les Palestiniens et souhaitaient qu’ils quittent le Liban. » Entre 1979 et 1983, « le Front a tué des centaines de personnes ».(...)

Ces attentats furent largement couverts par la presse américaine de l’époque. Le plus souvent, les journalistes américains décrivirent le FLLE comme un « mystérieux » ou « insaisissable groupe d’extrême droite ». À l’occasion, ils notèrent que les Palestiniens et leurs alliés libanais étaient convaincus que ce groupe n’était qu’une invention d’Israël destinée à cacher son rôle.

En revanche, aucune connaissance préalable du conflit libanais n’est requise pour comprendre l’ampleur et l’importance des révélations de Bergman.(...)

Des actions non autorisées ?

L’opération était menée dans le plus grand secret. Selon Bergman, elle ne fut jamais approuvée par le gouvernement lui-même et il n’y a « pas moyen de savoir » à quel degré Ezer Weizman, alors ministre de la défense, en fut informé. Mais malgré leurs efforts, Eitan, Ben-Gal et Dagan furent incapables de garder l’opération complètement hermétique. Bientôt, plusieurs hauts responsables d’AMAN (acronyme d’Agaf Ha-Modi’in, renseignement militaire israélien) s’y opposèrent énergiquement, mais sans succès. La contestation vint aussi de l’intérieur du gouvernement.