
En 2017, l’État d’Israël évolue comme un état ethnique, raciste, de différentes manières, discriminant ses citoyens palestiniens, installé dans une oppression incessante des habitants de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza. L’État se transforme peu à peu en un système politique qui, minant les valeurs démocratiques et humanistes, privilégie une définition très étroite du sionisme, celle d’une idéologie nationaliste.
Le 30 août 2017, la ministre de la Justice, Ayelet Shaked, a reproché à la Cour suprême israélienne de préférer les droits de l’homme aux intérêts sionistes. Elle a demandé que cela ne se reproduise plus. Sa remarque faisait non seulement allusion à une quelconque protection des droits des Palestiniens, mais à la prise de position en faveur des demandeurs d’asile africains. De manière indirecte, elle désavouait la décision de la Cour suprême dans son effort de sauver ce qui reste de la laïcité dans l’État juif au XXIe siècle.
La grande majorité des Juifs au sein de l’État d’Israël est encore laïque, cependant leur vie reste placée sous l’emprise de la religion, du berceau jusqu’à la mort. Le contrôle de l’establishment religieux renforce l’orientation raciste de l’État comme nous avertissait déjà dans les années cinquante le défenseur infatigable des droits humains, Israël Shachak.
Le mélange de nationalisme romantique fondé, d’une part sur un colonialisme et, d’autre part sur les religions, ne conduit pas à l’émergence d’authentiques démocraties comme nous le constatons ailleurs au Moyen-Orient et au-delà.(...)
Dans son livre, Ofra Yeshua-Lyth dénonce cette transformation de l’État ou sa maturation en la reliant à un autre problème majeur : le triste échec de la paix avec les Palestiniens, aujourd’hui et par le passé. Elle appelle explicitement à abandonner la solution de deux États qui reste le fondement de ce que l’on appelle le « processus de paix ».
Le mouvement colonial de peuplement sioniste souffre depuis ses débuts de cette interaction entre la démographie et la géographie. Il convoitait la terre mais ne voulait pas des indigènes du pays. C’est un casse-tête bien connu des mouvements coloniaux de peuplement. L’histoire se souvient du génocide en Amérique et en Australie. Au siècle dernier, les Sud-Africains blancs ont mis en place l’apartheid et les Français tentèrent d’annexer l’Algérie dans un bain de sang.(...)
Les gouvernements de droite, qui firent leur apparition pour la première fois en 1977 et qui dominent la scène politique depuis, ne pensent pas que la partition soit nécessaire pour réaliser et atteindre les buts de l’État, à savoir la colonisation de peuplement.(...)
Ainsi, à l’intérieur d’Israël, les Palestiniens gardent un statut de citoyens de seconde classe.
Ofra Yeshua-Lyth propose dans son livre une vision différente : un État laïc et démocratique pour tous ceux qui vivent entre la rivière du Jourdain et la Méditerranée. (...)
Le regretté Israël Shachak pensait qu’un mouvement national fondé sur l’identité religieuse deviendrait inévitablement théocratique et raciste, pratiquant l’exclusion. Ofra Yeshua-Lyth prend la mesure de ces développements pendant ces dernières décennies.