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Greek Crisis
Place aux jeunes
Article mis en ligne le 16 novembre 2017

Pluies et orages. L’air athénien sent déjà le bois brûlé à la tombée de la nuit. Nous implorons... le général Hiver : Clémence et indulgence. Cela dit, cette situation crisique grecque... est vieille de huit ans. “Une génération en termes de temps”, comme me le dit l’ami Dimitri. Donc temps d’hiver : “Les plus jeunes, ils n’auront pas connu autre chose, et d’ailleurs, c’est la précarisation ou rien, strictement rien, ils le savent”. C’est autant par cette réadaptation forcée de la société, rien que par la saignée, que le discours politique devient caduque, voire ridicule. Le quotidien... et son esprit de suite.

Devant notre immeuble, sans chauffage central depuis 2012, c’est entre voisins que nous extrapolons au sujet de la météo, mais en réalité, en matière de pratiques de... chauffage alternatif obligatoire. Nos mentalités évoluent, et notre état de santé avec... ou plutôt le contraire. Cet hiver, nous ne ferons pas fonctionner les deux chauffages à bouteille de gaz, ils seront remplacés par de l’électrique, cela nous épargnera, espérons-le, certaines visites chez le pneumologue.

Nos choix sont restreints, comme pour le reste..., puis, les factures d’électricité après relevé, elles arriveront comme on sait après l’hiver. “Nous aviserons”, tel est le... slogan révolutionnaire d’après la dernière mode dans notre immeuble, comme partout ailleurs au château branlant de l’édifice grec. (...)

Notre ami M. remarque encore, que d’une certaine manière, les embouteillages font leur retour en ce moment dans le quotidien de la ville d’Athènes. “Les gens, ceux ayant encore certains revenus, si possible fixes, les fonctionnaires par exemple, réadaptent leurs manières en la matière. Ils économiseront ailleurs et en réalité, ils se priveront, pour pouvoir éviter les rames bondées du métro et de Proastiakós (RER monoligne de la Région Attique). Ils veulent surtout éviter le contact, avec d’abord toute cette énergie négative des autres, puis, les agressions, les mendiants, les drogués, les vols, voire le bruit. Et aussi les grèves.”

“Puis, ils se rendent compte que même en voiture, leurs... périples deviennent de plus en plus tendus, comme jadis du temps où nos circulions en moto. Toujours en état d’alerte. Les gens conduisent comme si tous les autres n’existaient absolument pas. La société n’est plus, et elle devient de part ce fait de moins en moins fréquentable, sauf lorsque pour nos choix orientés, que et que j’appellerai ‘de niche’. Depuis plus d’un an, je rencontre ceux qui visitent les Monastères, puis les moines, leur spiritualité. J’y retrouve le calme, une posture sincère, une sorte même de catharsis psychique. Je peux mieux tenir le coup, mieux comprendre peut-être les autres, et... autant je dirais moi-même. Et ce n’est pas qu’une affaire de croyance.” (...)

Pour P., l’épouse de M., tout est autrement plus simple. Elle travaille dans le privé à temps plein et alors miracle, son salaire est versé, “c’est alors un authentique privilège” comme elle dit, à ses yeux. “Je touche 650€ en net par mois, et pour une fois, nos rapports et interactions au travail ne versent pas forcement dans le négatif. Mon problème c’est qu’après le 20 de chaque mois, il ne reste plus rien de mon salaire, nous avons avec M., deux enfants, un foyer... une petite vie.”

Ce n’est pas de la complainte augmentée... devant la réalité sans doute, c’est plutôt que notre univers immédiat a pris ces rides, auxquelles très précisément nous n’avions pas pensé durant les premières années de la dite “crise”. Univers lequel n’est pas que de dimension politique, nous le savons aussi.

Notre ami D., insiste sur la décomposition alors totale du monde du travail. (...)

“C’est un plan, il émane de ce fameux 1%, celui qui possède alors plus du 85% des richesses du monde. Que les autres ne possèdent plus rien. Qu’ils soient réduits à recevoir des aides de survie, si possible sous forme d’agent virtuel, surtout virtuel, c’est ainsi que l’on fabrique du bétail contrôlable. C’est aussi de cette manière que le 1% est en train de spolier tous les biens de la classe moyenne existante. La Grèce est un cobaye aux spécificités bien propres, hélas, les autres pays suivent et ils suivront, dans la mesure aussi, où nos métiers disparaissent sans forcément être remplacés. Sauf que peut-être tout explosera..”, dit-il notre ami D. en guise de commentaire.

Enfin, nous aurons évoqué la situation des jeunes. La presse grecque en ce moment l’évoque très largement , à l’occasion d’un récent reportage du “Der Spiegel”, consacré aux travailleurs pauvres que sont devenus les Grecs, et d’abord les jeunes, dans leur ensemble . Témoignages : (...)

" Je travaille 40 heures par semaine et je gagne 490 euros par mois. Je ne suis jamais payé des heures supplémentaires, et encore je ne reçois rien non plus lorsque je travaille le jour de Noël ou durant d’autres jours fériés. L’exploitation des travailleurs est encore plus féroce dans les petites entreprises. Ils nous observent constamment avec des caméras. Je vis toujours avec ma mère, car louer un appartement avec mon salaire c’est impossible. Ma mère et moi alors ensemble, nous parvenons tout juste à payer les traites de l’emprunt immobilier et cela, très difficilement. L’argent gagné n’est le plus souvent suffisant, que pour seulement les deux premières semaines de chaque mois.” Témoignage de Márkos Karidis, 30 ans (...)

Je travaille et tant qu’enseignant au sein d’un établissement privé, 25 heures par semaine, sauf que mon employeur déclare qu’il me rémunère pour seulement 15n heures par semaine, ceci, pour économiser sur mes cotisations de Sécurité Sociale et pour ne pas être obligé à me traiter comme un travailleur de temps plein. Mon salaire est de 500 euros par mois, mais seulement pour les 9, sur les 12 mois de l’année. Donc, je reçois en réalité 375 euros par mois. Je me sens... alors triplement perdant : Mon assurance sociale assurance n’est pas de plein droit, je ne suis jamais payé pour les heures supplémentaires, ni durant les jours de fête, et enfin, les prestations chômage que je toucherais en cas de perte de mon emploi, elles seront sensiblement réduites.”

“Je vis avec ma sœur, elle est enseignante dans une école publique. Nous n’avons souvent pas l’argent pour nous en sortir durant la totalité du mois - mais la situation pourrait même être pire. Parmi mes amis de l’université, seulement trois sur dix ont pu trouver un emploi fixe en tant qu’enseignants. Trois autres ont quitté la Grèce, et les autres, eh bien, ils ont du mal à joindre les deux bouts en plein univers des mini jobs sans rapport avec leurs études.” Témoignage de Giórgos Georgiádis, 27 ans . (...)