
Les systèmes de santé sont avant tout des systèmes sociaux. La manière dont ils fonctionnent aujourd’hui s’inscrit dans une histoire politique nationale mais aussi dans la diffusion d’idées et de croyances à l’échelle internationale concernant la manière dont ils devraient être organisés. Or, depuis plusieurs décennies, en de nombreux lieux de la planète, ce sont les idées néolibérales qui ont le vent en poupe et qui ont inspiré les réformes des systèmes de santé.
Un débat organisé par la revue internationale Social Science & Medicine a notamment permis de mettre en exergue les effets qu’ont eus les réformes néolibérales des systèmes de santé sur la résilience de ceux-ci, c’est-à-dire sur leur capacité à s’adapter aux chocs auxquelles ils sont exposés.
Les crises récentes, à commencer par la pandémie de Covid-19, ont mis à rude épreuve cette résilience, déjà mise à mal par les réformes des années précédentes.
Des systèmes de santé « néo-libéralisés »
Les exemples ne manquent pas, dans de nombreux pays du monde.
En France, Nicolas Da Silva montre parfaitement comment, au cours de l’histoire des réformes successives du système de santé, on a de plus en plus laissé le service privé et la pratique privée de la médecine se développer, y compris au sein des hôpitaux publics. Alors que les soins concernent d’abord les malades, ceux-ci ont été mis à l’écart des prises de décisions qui affectent directement leur vie.
Au Mali et au Sénégal, les thèses de Lara Gautier et de Jean-Hugues Caffin ont explicité comment les organisations internationales cherchent à imposer la mise en œuvre de réformes néolibérales des systèmes de santé nationaux, à commencer par l’indexation du financement sur la performance.
L’objectif, le plus souvent, est d’inciter à l’utilisation d’instruments politiques issus de la « nouvelle gestion publique » (New Public Management, NPM) où l’État est censé réduire ses actions au profit d’acteurs privés, soi-disant plus efficaces.
Dans le domaine des réformes hospitalières, cela se traduit par une demande de plus d’autonomie pour les établissements, d’approches contractuelles où les hôpitaux ont des objectifs à atteindre pour obtenir des financements, de séparation des fonctions entre l’acheteur et le fournisseur de soins, de paiement direct de la part des patients ou d’incitations liées à l’atteinte d’objectifs de performance.
Dans les années 1990, des études conduites au Ghana, au Zimbabwe, au Sri Lanka, en Inde et en Thaïlande avaient déjà mis en évidence les effets catastrophiques de ces approches sur le fonctionnement des hôpitaux et l’accès aux soins. En France, les réformes de l’hôpital public ont été qualifiées par des spécialistes de casse du siècle.
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Les systèmes de santé sont avant tout des systèmes sociaux. La manière dont ils fonctionnent aujourd’hui s’inscrit dans une histoire politique nationale mais aussi dans la diffusion d’idées et de croyances à l’échelle internationale concernant la manière dont ils devraient être organisés. Or, depuis plusieurs décennies, en de nombreux lieux de la planète, ce sont les idées néolibérales qui ont le vent en poupe et qui ont inspiré les réformes des systèmes de santé.
Un débat organisé par la revue internationale Social Science & Medicine a notamment permis de mettre en exergue les effets qu’ont eus les réformes néolibérales des systèmes de santé sur la résilience de ceux-ci, c’est-à-dire sur leur capacité à s’adapter aux chocs auxquelles ils sont exposés.
Les crises récentes, à commencer par la pandémie de Covid-19, ont mis à rude épreuve cette résilience, déjà mise à mal par les réformes des années précédentes.
Des systèmes de santé « néo-libéralisés »
Les exemples ne manquent pas, dans de nombreux pays du monde.
En France, Nicolas Da Silva montre parfaitement comment, au cours de l’histoire des réformes successives du système de santé, on a de plus en plus laissé le service privé et la pratique privée de la médecine se développer, y compris au sein des hôpitaux publics. Alors que les soins concernent d’abord les malades, ceux-ci ont été mis à l’écart des prises de décisions qui affectent directement leur vie.
Au Mali et au Sénégal, les thèses de Lara Gautier et de Jean-Hugues Caffin ont explicité comment les organisations internationales cherchent à imposer la mise en œuvre de réformes néolibérales des systèmes de santé nationaux, à commencer par l’indexation du financement sur la performance.
L’objectif, le plus souvent, est d’inciter à l’utilisation d’instruments politiques issus de la « nouvelle gestion publique » (New Public Management, NPM) où l’État est censé réduire ses actions au profit d’acteurs privés, soi-disant plus efficaces.
Dans le domaine des réformes hospitalières, cela se traduit par une demande de plus d’autonomie pour les établissements, d’approches contractuelles où les hôpitaux ont des objectifs à atteindre pour obtenir des financements, de séparation des fonctions entre l’acheteur et le fournisseur de soins, de paiement direct de la part des patients ou d’incitations liées à l’atteinte d’objectifs de performance.
Dans les années 1990, des études conduites au Ghana, au Zimbabwe, au Sri Lanka, en Inde et en Thaïlande avaient déjà mis en évidence les effets catastrophiques de ces approches sur le fonctionnement des hôpitaux et l’accès aux soins. En France, les réformes de l’hôpital public ont été qualifiées par des spécialistes de casse du siècle.
À lire aussi : Les racines de la crise de l’hôpital
Au Québec, une analyse portant sur 50 années (1961-2010) de réformes s’appuyant sur le NPM constate qu’elles ont abouti à « l’omniprésence de l’idéologie managériale » et eu un impact profondément négatif sur le système de santé. (...)
Ce qui est certain, c’est que « la poursuite de l’économie néolibérale ne résoudra pas les problèmes d’inégalité et de changement climatique, et ne fera pas de la santé un droit humain fondamental », comme viennent de l’affirmer Michael Marmot et Paulo Buss.