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Palestine : « Si vous croyez que nous sommes un peuple détruit, vous vous trompez »
Derrière les fronts : résistances et résiliences en Palestine, sortie nationale le 9 novembre 2017
Article mis en ligne le 18 novembre 2017

Dans un film dense et engagé, la réalisatrice Alexandra Dols interroge les conséquences psychologiques individuelles et collectives de l’occupation israélienne sur le territoire palestinien. À travers le témoignage d’une psychiatre et écrivaine vivant à Jérusalem, « Derrière les fronts » explore la souffrance sociale et la dépression collective liées au conflit et au système d’occupation et d’oppression mis en place par l’État d’Israël, faisant émerger des formes de résistance.

De nombreuses choses ont été dites, depuis plusieurs dizaines d’années, sur le conflit israélo-palestinien et ses conséquences géopolitiques, territoriales, humaines. Le documentaire Derrière les fronts nous rappelle qu’un élément a (souvent) été laissé de côté : l’impact psychologique lié au système d’oppression et d’occupation. Samah Jabr est psychiatre à Jérusalem et travaille en Cisjordanie, où ils ne sont que vingt à exercer cette profession. En 2007, alors que la réalisatrice Alexandra Dols tourne un film sur la place des femmes dans la guerre d’indépendance algérienne, elle découvre les chroniques de la psychiatre palestinienne. La particularité de Samah Jabr est, à la manière de Frantz Fanon, de politiser le psychologique, pour décoloniser les esprits. (...)

Ce qu’elle nomme « social suffering » ou encore « psychopathologie de la vie ordinaire » hante l’esprit des habitants de son pays et s’exprime de différentes manières : dépressions chroniques, angoisse d’être en permanence regardé ou filmé, réactions inquiétantes à des événements difficiles, difficultés à s’exprimer… Toutes ces réactions, extrêmement concrètes, viennent donner un visage psychanalytique à l’occupation israélienne en Palestine, mais aussi à l’absence de « protection » offerte par les responsables palestiniens. Car si Alexandra Dols a choisi de se concentrer sur la souffrance palestinienne (l’impact sur les Israéliens est laissé de côté rapidement, lors d’une rencontre entre psychiatres des deux côtés), les politiques palestiniens en prennent eux aussi pour leur grade.

Une fois ce constat établi, le film tente de comprendre comment se construisent ces processus dépressifs, et donne à voir les causes d’une dépression collective. (...)

En passant de l’individuel au collectif, les deux femmes dessinent les contours d’un traumatisme transgénérationnel qui atteint la dignité des êtres, et que l’on pourrait rapprocher de processus coloniaux passés, comme en Algérie, notamment. D’où l’importance du film, en ce qu’il représente une véritable prise de parole. Samah Jabr fait ainsi remarquer que les Palestiniens parlent peu, mais qu’on parle souvent à leur place. Or, le processus de guérison passera forcément par une libération de la parole, et du langage.

La deuxième partie du film s’attelle justement à montrer les fils de résistance. Parfois décousue, et s’éloignant du journal de la psychiatre palestinienne, la seconde moitié de Derrière les fronts illustre qu’après la résilience, vient la résistance, et que les deux sont liées. (...)

Tous dessinent le « Sumud », concept difficilement traduisible, que l’on pourrait décrire comme un état d’esprit de résistance, comme un système d’actes pour sauvegarder l’identité palestinienne (...)