
Les récents pourparlers de paix israélo-palestiniens ont été aussi peu fructueux que les précédentes négociations, mais on assiste depuis le sommet de Camp David en 2000 à une évolution indéniable : l’influence des partis de droite opposés à la solution à deux Etats s’est nettement accrue en Israël et celle des sionistes-religieux au sein de la droite également.
Les Juifs sionistes-religieux ne représentent que huit à dix pour cent de la population israélienne, mais, signe de leur forte influence au sein du parti Likoud, ils ont obtenu vingt sièges à la Knesset (le parlement israélien) lors des élections de 2013. Cela a permis au Foyer juif, le parti sioniste-religieux dirigé par Naftali Bennett, de se présenter comme un partenaire indispensable de la coalition gouvernementale. Cette montée en puissance de la communauté sioniste-religieuse représente une opportunité tout autant qu’elle crée une obligation de remédier à une faiblesse récurrente du processus de paix : l’exclusion quasi-totale des acteurs religieux et de leurs intérêts.
MAKING OF
Ce texte a été écrit avant la recrue actuelle de la violence au Proche orient. Ofer Zalzberg est analyste principal pour le Moyen-Orient de l’International Crisis Group. La version originale en anglais de l’article a été publiée par Fathom. Pascal Riché
Il n’est pas évident de déterminer comment prendre en compte cette communauté dans le cadre des efforts de résolution du conflit. Le noyau dur de celle-ci, qui est composé des disciples du défunt Rabbi Avraham Yitzhak HaCohen Kook, estime que la rédemption totale n’adviendra que lorsque tout le peuple d’Israël vivra sur toute la terre d’Israël sous complète souveraineté juive. La construction de colonies constitue de ce fait un élément intrinsèque de leur projet.
Un sentiment d’échec (...)
Malgré leur apparent succès, les sionistes-religieux israéliens n’ont jamais été aussi préoccupés par la stagnation de leur projet de colonisation, qui, selon eux, n’a plus enregistré d’avancée majeure depuis vingt ans. La croissance des colonies existantes s’est poursuivie, mais presque aucune nouvelle colonie n’a été créée depuis 1996. Plus de cent avant-postes (colonies considérées comme illégales par la loi israélienne), qui n’abritent guère plus de 5 000 colons, sont confrontés à d’importants obstacles juridiques, poussant les partisans des colons à être sur la défensive. (...)
Au cours des dernières années, ce noyau dur a accumulé du pouvoir au sein du Likoud afin d’influencer, de l’intérieur, la prise de décision au niveau national. Il a en outre lancé des campagnes fortes pour conquérir l’opinion publique et défendre le maintien du contrôle israélien sur la terre d’Israël. Conscients de la nécessité de formuler une alternative claire à la solution à deux Etats, certains de leurs dirigeants ont commencé à appeler, de manière toujours plus explicite et systématique, à l’annexion de tout ou partie de la Cisjordanie/Judée-Samarie, ainsi qu’à la naturalisation d’une partie ou de la totalité de ses résidents arabo-palestiniens.
La doctrine de Kook et ses partisans possèdent de multiples facettes et ne peuvent être réduits à leur attachement à la terre. Leur théologie ne sanctifie pas exclusivement la terre et les sionistes-religieux ne sont pas tous aussi inflexibles à ce sujet.
D’une part, le plan de désengagement de Gaza a clairement désavoué les nombreux experts qui affirmaient que tous les sionistes-religieux étaient des fondamentalistes qui, le moment venu, privilégieraient la terre au détriment du pays et auraient recours à la violence contre l’Etat. En effet, le noyau dur idéologique de la communauté sioniste-religieuse sanctifie la terre mais également, et tout aussi résolument, le peuple juif et l’Etat d’Israël, dont l’existence même constitue d’après eux une des étapes du processus de rédemption. (...)