Quelque 5 000 migrants sont entassés dans des conditions précaires dans le camp pour réfugiés de l’île de Samos, en Grèce, prévu pour accueillir seulement 700 personnes. Une situation extrême qui engendre des problèmes sanitaires. L’ONG Med’EqualiTeam, à la tête d’une clinique sur place, assure manquer de tout.
la surpopulation, la promiscuité et le manque d’hygiène sont sources de maladies contagieuses et d’infections. À dix minutes à pied du camp, une clinique de l’ONG française Med’EqualiTeam, qui n’a plus l’autorisation de se rendre dans le camp depuis mai dernier, accueille, soigne et écoute les migrants. Elle tire aujourd’hui la sonnette d’alarme.
Entretien avec Maryline Falkowski, porte-parole et traductrice officielle de l’ONG.
InfoMigrants : Quelle est la situation sur place ?
Maryline Falkowski : Dans le camp, la situation est particulièrement compliquée. Alors que chaque personne est censée avoir un logement, dans les faits, beaucoup dorment dans la "jungle", c’est-à-dire la forêt à côté du centre officiel. Ils sont entassés. Parfois, quatre ou cinq familles vivent dans une tente pour 6 personnes. Par ailleurs, ils ne peuvent ni boire ni manger correctement, ni même dormir correctement, donc leur système immunitaire est mis à mal. En plus de cela, ils n’ont pas accès à des sanitaires qui fonctionnent bien. Cette saleté et cette promiscuité engendrent des problèmes d’hygiène. C’est une catastrophe. (...)
On a constaté un très net changement ces derniers mois dans la clinique : nous accueillons actuellement une centaine de patients chaque jour, contre 30 à 40 par jour à la même époque l’année dernière.
Quelles sont les pathologies auxquelles vous êtes confrontés ?
Très régulièrement, le camp est contaminé par la gale. Il y a également beaucoup de parasites, comme par exemple les poux. Quand on a grandi dans un environnement avec des conditions hygiéniques correctes, on ne se rend pas compte des dégâts que peuvent créer les poux, mais c’est catastrophique. Les piqûres peuvent devenir des abcès purulents. En juin, on a aussi eu une épidémie de varicelle (...)
Vous avez lancé un appel aux dons. De quoi avez-vous besoin ?
Tout est urgent. Matériellement, nous manquons de tout. Par exemple, de dentifrice. C’est banal mais une infection des dents peut se révéler gravissime. Nous avons aussi besoin de serviettes hygiéniques, d’autant plus car les femmes n’ont pas accès à des sanitaires à proprement parler. Il nous faut des traitements contre la varicelle, de la crème pour la gale, des médicaments pour des problèmes de constipation, qui sont fréquents ici, ou encore de la mélatonine car énormément de patients souffrent de cauchemars et d’insomnie en raison de leur traumatisme, de l’inconfort dans lequel ils vivent et de l’inquiétude quant à leur avenir. (...)
Fournissez-vous de l’aide psychologique ?
Nous n’avons pas de psychologue mais nous avons souvent affaire à des personnes qui ne sont pas très solides psychologiquement, donc nous les redirigeons vers Médecins sans frontières [l’ONG est présente dans le camp, NDLR] qui organise des consultations de groupe, mais ils ne sont pas assez nombreux. Beaucoup de patients ont besoin de parler, d’exister tout simplement. Ils se sentent complètement perdus, ils sont bloqués là sans savoir pour combien de temps, ils se sentent en prison. (...)
Nous sommes débordés. L’hôpital de la ville, lui, ne soigne les réfugiés que si leur cas a été médicalement reconnu en amont. En gros, il faut qu’il s’agisse d’une pathologie lourde, comme une tumeur au cerveau ou un problème cardiaque, et les délais sont extrêmement longs. Nous sommes donc la seule structure pour les réfugiés à Samos. On a un sentiment d’impuissance écrasant.