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"Les puissants ont peur quand ils sont face à la désobéissance civile organisée"
Entretien avec la soeur Teresa Forcades et l’activiste Esther Vivas
Article mis en ligne le 16 octobre 2013
dernière modification le 12 octobre 2013

Interview de la docteure en santé publique de l’Université de Barcelone, Teresa Forcades, bénédictine au monastère Sant Benet de Montserrat, et de la journaliste et activiste Esther Vivas à propos du livre « Sense por » (Sans peur) qu’elles viennent de publier chez Icaria Editorial. Toutes deux s’accordent sur ​​l’initiative du Processus Constituant, mouvement initié il y a quelques mois par Forcades elle-même et l’économiste Arcadi Oliveres, proche des groupes chrétiens de défense des droits de l’Homme, dans l’objectif de créer une organisation de gauche la plus unitaire possible pour les prochaines élections régionales de Catalogne. Ce dimanche, l’initiative sera présentée publiquement à Barcelone, devant un public qui s’annonce nombreux.

Pourquoi « sans peur » ?

Esther Vivas (E.V.) : Parce que nous pensons que les gens commencent partiellement à perdre leur peur. Pendant longtemps, on a voulu nous faire croire qu’il n’y a pas d’alternative, qu’on ne peut rien faire pour changer les choses mais, en cette période de crise tellement profonde, les gens commencent à voir le vrai visage du système capitaliste. Aujourd’hui, tout le monde peut constater que le capitalisme est incompatible avec la vie, la couverture des besoins de base. La population se rend compte que ce n’est pas seulement une crise de plus mais bien une escroquerie, qu’ils sont en train de nous voler.

Ces derniers temps, nous avons vu comment la population a commencé à désobéir massivement. Le 15-M a été un acte de désobéissance civile massive. Les gens occupent les logements vides des banques et les rendent aux personnes qui en ont été expulsées. Les gens occupent les entrées des hôpitaux, des écoles, des supermarchés,… et ces actions sont appuyées par de larges secteurs de la société, qui sont davantage d’accord avec ceux qui occupent, s’indignent, se révoltent et désobéissent qu’avec ceux qui imposent des coupes budgétaires. C’est pour ça que notre livre s’intitule “sans peur”, parce que les gens commencent à perdre leur peur et à défier le pouvoir. Face à la légalité du système, nous opposons la légitimité de la rue, des luttes, des droits et des besoins des gens. (...)

On peut se demander où sont passées les assemblées du 15-M. Mais, maintenant, nous sommes dans une période de mobilisation sociale très haute. Le pays est en résistance. Ce qui se passe, c’est que les médias essaient de présenter ça d’une autre façon. S’ils nous informaient tous les jours des initiatives qui existent au niveau local, nous aurions une vision très différente.

Nous sommes dans une période en ébullition et c’est une période forte pour les mouvements sociaux et les initiatives qui revendiquent la justice sociale. Nous avons une opportunité à saisir pour que tout cela nous mène à une alternative politique viable. (...)

La radicalité du changement ne peut pas se contenir dans un seul pays. Mais il y a des pays d’Amérique Latine ou de Méditerranée qui ont le potentiel pour générer des mouvements de changement. Il est concevable de réaliser des changements en solitaire, comme c’est le cas en Islande, où des améliorations substantielles ont été engrangées pour la population en évitant la dépendance à une dette illégitime que nous n’avons pas à payer. Mais un changement de modèle nécessite, lui, des alliances au niveau international.. (...)

Nous vivons dans une société où, quand tu essaies de faire valoir tes droits, tu obtiens une réponse répressive. Il y a plusieurs lois clairement incompatibles avec nos droits. Ce que nous devons faire c’est, de façon bien organisée et structurée, pratiquer la désobéissance civile. Les puissants ont peur quand la base sociale est prête pour des actes pacifiques de désobéissance civile.