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Les peuples indigènes sont les meilleurs protecteurs de la nature
Article mis en ligne le 21 janvier 2015
dernière modification le 18 janvier 2015

À travers le monde, des politiques de conservation de zones naturelles sont souvent un alibi pour accaparer les terres et exploiter les forêts. Il est temps de repenser la « conservation », en l’associant aux peuples indigènes qui restent les meilleurs défenseurs du monde naturel.

(...) Depuis son origine, la ‘conservation de la nature’ a toujours privilégié la protection de l’environnement naturel contre une activité humaine prétendument destructrice. Cet acharnement s’est matérialisé par la création d’espaces protégés dans le monde entier.

Qu’il s’agisse des parcs naturels de Yosemite et Yellowstone aux Etats-Unis au XIXe siècle ou encore des nombreuses aires protégées actuelles, cette volonté de préserver sous cloche une ‘nature sauvage’ a provoqué l’expulsion d’un grand nombre de populations. Parmi elles, les peuples indigènes, qui payent très cher cette volonté de rendre les espaces protégés vierges de toute présence humaine. Pourtant, la diversité humaine et la diversité biologique sont loin d’être incompatibles. (...)

Les peuples indigènes sont étroitement liés à l’environnement et au territoire dont ils dépendent, dont ils prennent soin et dont ils tirent tous leurs moyens de subsistance depuis d’innombrables générations. Lorsqu’ils en sont séparés, toutes leurs traditions, leurs savoirs, leurs croyances et par-là même leur identité disparaissent.

Une "préservation" qui chasse les hommes

Dans la plupart des cas, la conservation, telle qu’elle est pensée aujourd’hui, ne fonctionne pas : non seulement elle ne parvient pas à protéger l’environnement mais elle nuit aux peuples.

Son échec s’explique par le fait que l’image positive qu’elle véhicule dans les pays industrialisés est loin de correspondre à celle qui est perçue sur le terrain : au niveau local, elle est simplement vue comme une autre forme de colonialisme, qui tire avantage de l’accaparement des terres, du tourisme de masse (commercialisé sous un label ‘éco’), de la chasse aux trophées, de la production de biocarburants, et même de l’exploitation forestière et minière.

Au Cameroun, les ‘Pygmées’ baka qui sont expulsés de leurs terres au nom de la conservation sont réprimés en tant que braconniers sur leurs propres terres et victimes de graves abus de la part de gardes forestiers qui bénéficient du soutien financier d’une grande organisation de conservation.

En Inde, les peuples tribaux qui ont toujours coexisté avec les tigres sont soumis à d’énormes pressions pour quitter leurs territoires au nom de la protection des tigres. Les réserves de tigres ne sont qu’un alibi à l’accaparement de terres et à l’exploitation forestière. (...)

Mais cette conception résulte également de la volonté, éminemment raciste, de plusieurs gouvernements d’intégrer, de moderniser et de contrôler les peuples indigènes de leurs pays.

Les réglementations nationales sont donc conçues pour imposer l’expulsion des populations autochtones et les forcer à adopter de nouveaux modes de vie, une agriculture plus intensive, à se sédentariser et à renoncer à la propriété collective de leurs terres dans l’espoir qu’elles se fondront un jour dans la société nationale dominante. (...)

La conservation nécessite un changement radical, elle peut – et elle doit – être pensée différemment, conformément au droit international, et prévoir toutes les mesures nécessaires pour garantir la survie des peuples indigènes. Elle doit s’appuyer sur leur expérience et leur expertise car ils savent, mieux que quiconque, prendre soin de leur environnement. Ils sont les meilleurs défenseurs et les meilleurs gardiens du monde naturel.