
(...) De nombreux mouvements citoyens comptent bien jouer les trouble-fêtes en lançant un appel à une démocratie plus participative où le pouvoir est dans les mains des citoyens et non dans ceux des partis et des professionnels de la politique. Ils s’attachent avant tout à une réécriture des règles du jeu par un changement et un renouvellement des institutions.
Ces mouvements sont portés par un élan international. Le mouvement des Indignés en Espagne (2011), prémice de la constitution de Podemos, la révolution tunisienne (2010-11) ou encore les Partis pirates présents dans une soixantaine de pays, sont autant de sources d’inspiration différentes. En France, les occupations des places publiques par Nuit Debout à partir du 31 mars 2016, en marge des manifestations contre la loi Travail, ou dans une moindre mesure la gouvernance collégiale de la commune de Saillans (Drôme) ont fait émerger de nouveaux espoirs.
« Nous vivons à la fois une crise démocratique et une ébullition de la participation démocratique », constate l’auteur de « Le coup d’État citoyen » (La Découverte, 2016), Romain Slitine, maître de conférence à Sciences Po et spécialiste des mouvements citoyens.
L’échec de la présidentielle
Face à ce constat certains ont franchi le pas et tenté de participer à l’élection présidentielle. L’auteur du Zèbre, Alexandre Jardin, du mouvement « Les Citoyens », mettait en avant les « faizeux », ceux qui font, entrepreneurs, associatifs, citoyens comme source de solutions contre les « diseux », qui se contentent de parler.
L’adjointe déléguée à la santé de la mairie de Rennes (Ille-et-Vilaine), Charlotte Marchandise, était elle la candidate désignée par le scrutin en ligne LaPrimaire.org auquel ont participé 32.685 personnes. Contre « une classe politique (...) qui a confisqué toutes les manettes du pouvoir », elle s’engageait « à tout mettre en œuvre pour permettre à tous les citoyens qui le souhaitent d’exercer un mandat électif. »
Ce fut un échec. Aucun des deux candidats n’a obtenu les 500 parrainages d’élus nécessaires. Le conseil constitutionnel n’en a validé que 165 pour Alexandre Jardin et 135 pour Charlotte Marchandise.
La candidate explique ce revers par la « pression » des partis politiques sur les élus, le manque de temps entre l’issue du scrutin par Internet et la remise des parrainages au conseil constitutionnel, le déficit de couverture des « grands médias » ...
« Une des hypothèses c’est que ces personnes qui ont voté à La Primaire.org ne sont pas forcément des habitués de l’engagement civique » avance Loïc Blondiaux, professeur de sciences politiques et spécialiste de la démocratie participative, dans un entretien avec Equal Times.
C’est un des écueils du mouvement de la civic tech, ces initiatives qui misent sur Internet et les nouvelles technologies pour améliorer la participation et le système politique : l’éloignement du terrain. (...)
Les frontières entre la sphère politique et les mouvements citoyens sont poreux. Leïla Chaibi a mis un temps son parcours militant au sein du Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon entre parenthèses et participé activement à Nuit Debout. (...)