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Non Fiction
Le tour du monde en 88 aliments
#alimentation #cuisine
Article mis en ligne le 24 novembre 2022
dernière modification le 23 novembre 2022

Après l’enthousiasmant Magasin du monde, qui retraçait l’histoire de la mondialisation par les objets, Pierre Singaravélou et Sylvain Venayre dirigent une nouvelle étude à travers l’histoire des aliments et de leur mondialisation. Pierre Singaravélou est spécialiste des empires et de la mondialisation, professeur à Paris 1 Sorbonne et au King’s College London tandis que Sylvain Venayre est professeur à Grenoble-Alpes et spécialiste du XIXe siècle, des échanges et des identités.

Une histoire culturelle et identitaire du quotidien

C’est d’abord une histoire culturelle à laquelle nous convient les auteurs. Parce qu’on est ce que l’on mange, l’ouvrage montre à quel point les identités se construisent, luttent et se retrouvent à travers l’alimentation. Ainsi, les auteurs rappellent que ces produits répondent, pour la plupart, à un « mythe des origines » dont il s’agit de comprendre la réalité et la reconstruction. A l’image du thé, devenu symbole des nationalistes indiens mais qui est en réalité importé par les Britanniques de Chine au moment des guerres de l’Opium, beaucoup d’aliments marquent les identités et les particularismes culturels.

De la France, on retient le Roquefort, premier produit solide labellisé AOP en 1905, les sardines à l’huile, pionnières de l’industrialisation alimentaire, ou encore le champagne.

D’Asie voyagent des aliments qui restent associés à l’imaginaire des cultures chinoise (comme le dim sun), nippone (le sushi, le ramen, le saké), ou indienne (le curry, le naan).

Les Etats-Unis ne sont pas en reste, tant sont nombreux les produits alimentaires symboles de l’American Way of Life : le Coca-Cola, le hamburger ou le hot-dog, « coupe faim de l’Amérique ». On y trouve aussi détaillé l’exemple des corn flakes, inventés par des végétariens en quête d’une alimentation saine à la fin du XIXe siècle, devenu un « fait social total », associé au début du XXe siècle au lait et au sucre, et désormais symbole du petit déjeuner dans le monde entier

. Les auteurs développent chacun de ces exemples en en rappelant les origines et la diffusion dans le reste du monde. Les aliments sont aussi parfois des marqueurs de moment historiques (...)

Enjeu culturel, l’origine des aliments est parfois l’objet de controverses, notamment lorsqu’il s’agit de déterminer la provenance d’un aliment ou d’un plat. Les auteurs rappellent alors à quel point les emblèmes culinaires nationaux sont des constructions historiques dans le rapport à l’autre. Plus encore, les classements au patrimoine immatériel de l’UNESCO font naître des querelles intenses sur certains plats, marqueurs identitaires revendiqués par plusieurs nations (...)

L’ouvrage revient aussi, à travers beaucoup d’entrées, sur les manières de manger : on mange le hot-dog debout, les frites avec les mains et les makis à la baguette. C’est aussi une enquête intéressante sur les manières de boire (...)

Une histoire au cœur de l’industrialisation contemporaine

Siècle des grandes migrations, le XIXe siècle est aussi celui de l’industrialisation et de la diffusion de nouvelles méthodes de production : à cet égard, l’industrie alimentaire n’est pas en reste. (...)

L’histoire sociale est aussi très présente dans les différents articles, au-delà de la question de l’immigration. Car ce XIXe siècle qui s’industrialise est aussi celui qui voit l’émergence de classes sociales distinctes : les classes ouvrières et les classes bourgeoises. Là encore, l’alimentation est différenciée et l’appartenance de classe joue beaucoup dans l’appropriation et la diffusion des aliments. (...)

Enfin, les mutations plus contemporaines ne sont pas oubliées : les débats actuels sur la nécessité d’une alimentation saine, respectueuse du bien-être animal et de la planète, ouvrent des perspectives intéressantes. (...)