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Rue 89 / Nouvel Observateur
Le président de la Croix-Rouge internationale : « Les formes de conflit ne cessent de changer »
Article mis en ligne le 2 mai 2014
dernière modification le 26 avril 2014

En 2013, le CICR a fêté son 150e anniversaire. L’année en cours verra une nouvelle célébration, celle des 150 ans de la signature de la première Convention de Genève, qui fut le point de départ de tous les règlements du droit international moderne.

Swissinfo.ch : Vous venez de rentrer de Centrafrique, où la situation est désastreuse. Quelles sont vos priorités pour cette région ?

Peter Maurer : De nombreuses choses ne font pas partie de la mission de base du CICR. Nous encourageons d’autres acteurs à s’engager. Renforcer la présence internationale est l’une de ces priorités. Dans un pays n’ayant pas d’armée ou de police fonctionnant correctement, la sécurité doit être assurée par une présence internationale crédible.

Je saluerais une opération internationale sous l’égide de l’ONU pour renforcer la contribution des forces de paix africaines et françaises.

Les efforts de désarmement doivent en outre être plus crédibles. Il ne se passe pas grand-chose en ce moment. Le CICR a aussi besoin d’un engagement plus marqué du côté du droit et de la justice.

Mais, plus que tout, c’est un processus politique crédible et non exclusif qui manque. Cela donnerait confiance à la communauté internationale pour investir davantage d’énergie dans tous ces efforts de stabilisation.

Le pays se trouve actuellement en mode « substitution » : il n’y a presque pas de structures d’Etat pour la santé, l’eau ou le système sanitaire. Des dizaines de milliers de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays. (...)

Il y a de bonnes raisons d’être plus transparents sur de nombreux dossiers, d’être plus affirmatifs et plus ouverts concernant nos doutes et les questions que nous nous posons.

Nous ne devrions pas avoir l’ambition de travailler entre nous dans une salle sombre puis de présenter la solution au monde. Ce n’est plus le monde dans lequel nous vivons.

Nous vivons dans un système humanitariste international où d’autres réfléchissent tout aussi bien que nous.

Nous devons donc participer à ce processus de réflexion et y trouver notre rôle. Cela requiert de l’engagement, des partenariats et de la transparence, mais aussi des activités qui, parfois et dans certains contextes, ne sont pas sous les projecteurs et où nous pouvons travailler calmement. (...)

les conflits évoluent, adoptent de nouvelles formes, avec de nouveaux types d’acteurs et de nouvelles armes. L’environnement humanitaire change également. Nous ne sommes plus les seuls à apporter aide et protection humanitaire.

Entre 2015 et 2018, nous tenterons de répondre aux nouveaux défis en mariant la tradition avec ce nouvel environnement. Notre mandat de protection continuera à occuper une grande partie du travail. Les partenariats seront définis avec soin. Il faudra analyser ce qu’ils apportent et quelles sont leurs limites.

Nous aborderons aussi les nouveaux développements en termes de violence, d’armements et d’acteurs des conflits. Il n’y a pas de recette toute faite pour répondre à ces défis. (...)

Vous célébrez un nouvel anniversaire en 2014, les 150 ans de la signature de la première Convention de Genève. Quand on voit qu’en Syrie, en République centrafricaine ou au Sud Soudan, les hôpitaux sont attaqués et les blessés ne sont pas traités, il est permis de se demander si ce texte est encore pertinent…

Ces problèmes ne veulent pas dire que le droit n’est pas pertinent. Cela veut dire qu’il y a toujours de nouveaux défis à relever. L’adéquation entre la réalité du champ de bataille et le droit est difficile à réaliser. Le fait qu’il s’agisse de bonnes normes est indéniable. (...)