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Sud-Ouest
Le monde repose sur les genoux d’une fourmi
Gabriel Okoundji - 1er janvier 2012
Article mis en ligne le 4 janvier 2012
dernière modification le 2 janvier 2012

"Elle nous parlait autour du feu. C’était comme si les bulles d’émotion circulaient dans l’univers. Elle nous donnait tout cela pour que nous puissions garder plus tard la sensibilité d’être au monde, pour que nous puissions apprécier la bonté de l’univers. "

Le poète regarde le monde, colle son oreille au sol pour mieux capter les bruits de l’univers. Lorsque j’entends parler de crise, je me dis que ce mot m’est totalement étranger. Crise de quoi ? La crise est constitutive de l’être humain. De la civilisation, de l’univers. Tout ce que je vois autour de moi, c’est, en fait, une crise de l’humain qui échoue à vivre son humanité en harmonie avec l’environnement. Tout le reste n’est que chahut. Nous sommes comme des apprentis sorciers qui ne savent plus de quel côté ils doivent se tourner. (...)

C’est seulement en partant de l’émotion que l’on peut découvrir l’autre dans sa réalité, sa force et sa faiblesse. Il est temps de reconnaître le droit à la fragilité plutôt que de maintenir l’illusion de la toute-puissance.

Le vrai savoir, c’est ce que j’appelle l’initiation. Initier, c’est apprendre à donner le savoir dans cette dimension qui apporte à l’homme la bonté de l’univers. Être initié, c’est apprendre à recevoir le don de cette connaissance, de telle façon qu’il n’y ait pas quelqu’un au-dessus et quelqu’un au-dessous. Car aucun homme, aucun peuple, n’a le monopole du savoir.
(...)

Les liens de l’homme avec la nature sont une évidence. Je parle parfois le même langage que les gens de la Dordogne ou des Landes. Avec des mots différents, on nous a appris que l’homme, l’arbre, l’animal ne sont qu’une même matière
(...)

En Afrique, on dit que seules la patience et la lenteur garantissent l’éternité du chemin. On ne peut pas bâtir une maison en une seule journée, éternellement être le plus fort. Ce n’est pas pour rien que nous sommes devenus de très grands consommateurs de tranquillisants ou de somnifères. Le mot « peur » a disparu de notre vocabulaire au profit du stress et de l’angoisse. Il est normal que l’on ait peur, de l’orage, de la nuit, des dieux. Cette peur naturelle est devenue une peur de ne pas réussir, de ne pas pouvoir être au top. C’est à tout cela qu’il faut essayer d’échapper, en ayant ce que j’appelle une vision poétique de la vie. (...)

Vivre poétiquement, c’est ce que Stéphane Hessel appelle s’indigner. C’est résister, insister. Insister, c’est se dire que lorsqu’on n’a plus le choix, il reste la volonté. Pampou m’a appris que la volonté est le seul fétiche efficace de l’homme. Vivre poétiquement, c’est avoir la capacité de prendre son temps. De ne pas avoir peur du vide, du chaos. De ne pas avoir peur d’avouer sa faiblesse. De se dire que le bien-être matériel n’est pas synonyme du bien-être mental.

Vivre poétiquement, c’est aussi respecter la nature. Ce n’est pas être écolo, dire « Je vais éteindre la lumière et trier ». C’est avoir conscience que nous ne formons qu’un avec l’univers, et qu’en prenant soin de nous-même, nous prenons soin des autres et du monde qui nous entoure, ou inversement.

(...)

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