Certaines starlettes du Web profiteraient de leur notoriété pour abuser de leurs (très) jeunes fans. Alors que la rumeur circule en coulisses depuis des années, le YouTubeur Squeezie a crevé l’abcès en publiant un tweet ravageur, dont les conséquences pourraient aider à prévenir des malveillances en ligne.
n petit tweet et puis s’en va. Lundi 6 août, quelques heures avant son départ en vacances, le vidéaste Squeezie (plus de 11 millions d’abonnés sur YouTube) poste cette petite bombe sur Twitter : « Les YouTubeurs (y compris ceux qui crient sur tous les toits qu’ils sont féministes) qui profitent de la vulnérabilité psychologique de jeunes abonnées pour obtenir des rapports sexuels : on vous voit. La vérité finit toujours par éclater. »
Ce message, bien suivi par un autre, dans lequel Squeezie refuse de donner des noms, suscite alors immédiatement des dizaines de milliers de retweets. Sur le hashtag #BalanceTonYouTubeur, lancé dans la foulée, des internautes, parfois sans preuve, commencent alors à dénoncer des abus de YouTubeurs, bien souvent à l’encontre d’abonnées mineures. Des articles de presse suivent, recueillant des témoignages anonymes, voire, dans le cas du Parisien, pointant du doigt directement plusieurs vidéastes : Wass Freestyle, Math Podcast, Anthox Colaboy et From Human to GOD – ces deux derniers démentant ces accusations, l’un dans un message sur Twitter, l’autre dans une vidéo postée sur sa chaîne.
Pour les grands médias, les parents d’abonnés, c’est l’effroi : certains YouTubeurs, adulés par leurs enfants, pourraient être de dangereux prédateurs. Dans le milieu des vidéastes et des abonnés les plus avertis pourtant, cela n’a pourtant rien de surprenant.
Les YouTubeurs, nos amis les rockstars (...)
Abus en ligne
On constate ainsi, dans les captures d’écran d’échanges numériques révélés ces derniers jours, que les vidéastes visés misent sur l’affection de leurs abonnées pour réclamer des photos d’elles nues ou des rendez-vous. Ces jeunes filles, parfois effrayées à l’idée de décevoir leur idole, ont obtempéré malgré elles, pas toujours conscientes de l’abus dont elles étaient victimes. En août 2017, dans un article du magazine Newstatesman, une fan du YouTubeur américain Austin Jones expliquait ne pas avoir voulu « l’énerver ou qu’il arrête de m’aimer » quand il lui a demandé de lui envoyer des vidéos de danse à caractère sexuel, alors qu’elle n’avait que 15 ans. Le vidéaste a depuis été arrêté et poursuivi, comme plusieurs autres aux Etats-Unis pour des abus similaires. En France, à notre connaissance, une seule affaire a connu à ce jour des suites judiciaires, et elle ne concernait pas un YouTubeur mais un manager influent dans le milieu, Benjamin Lemaire.
On savait, ou on se doutait, mais on ne disait rien
Pourtant, depuis des années, des témoignages, pas toujours anonymes, avaient déjà été partagés sur Twitter, sans autre conséquence. Dans le petit milieu des YouTubeurs, rumeurs et accusations parsemaient aussi les conversations privées, que ce soit aux soirées, sur les serveurs de la plateforme Discord ou sur les réseaux sociaux. (...)
Pour ambigu et « facile » qu’il soit, le tweet de Squeezie a donc eu au moins un mérite, et pas des moindres : pointer du doigt cette culture néfaste. L’écho médiatique de ce message, et celui du hashtag #BalanceTonYouTubeur, permet de mettre en lumière des témoignages, et sensibilisera probablement les parents aux risques de la vie numérique de leurs enfants.
Dans les mois qui viennent, il faudra voir si ces prises de parole auront vraiment un impact sur le milieu, si des vidéastes se mobiliseront pour utiliser leur influence afin de faire de la prévention auprès de leur communauté et dénoncer tout comportement illicite dont ils seraient témoins. (...)