
Le niveau d’information faible, les informations même dont nous disposons, la répétition des mêmes données sans qu’on puisse en débattre, font que le citoyen qui cherche à conserver sa lucidité, sa rationalité est bien en peine de comprendre la crise sanitaire actuelle et conduit à l’immobilité de sa réflexion comme de ses actes.
Mais enfin, me disait un ami, tu ne vas quand même pas prétendre que le Covid 19 a été créé par tel ou tel gouvernement et qu’il a sciemment déclenché l’épidémie ? Ce n’est pas du tout ce que je veux dire.
Dès le départ de cette crise j’ai pensé que le contrôle était prioritaire par rapport au soin. Je l’ai pensé parce que nous étions, dès avant la mesure de confinement généralisé, placés dans l’ignorance par rapport à notre situation individuelle devant la maladie. Nous ne pouvions, ni savoir si nous étions malades, le diagnostic étant impossible ou très difficile à obtenir, ni réellement nous protéger, puisque nos institutions publiques de santé ne disposaient ni de masques ni de tests ou si peu. (...)
L’information débattue est le coeur vital d’une démocratie qui prend au sérieux tous les enjeux sociaux y compris les enjeux de santé. Aucun de ces enjeux ne doit pouvoir échapper aux débats contradictoires pour savoir comment agir. Beaucoup le disent, et de beaucoup plus savants que moi, l’accès à l’information dans son caractère contradictoire est absolument essentiel à la vie démocratique. Sans ces débats, ses affrontements, qui aboutissent non pas à des données absolues en termes d’information mais à des données dont chacun peut retrouver la ou les sources, la réflexion humaine "tourne à vide". (...)
Il ne s’agit pas d’écrire que la nature et ses virus agissent avec une petite étiquette néolibérale sur leur front, mais de comprendre comment il est possible d’aller très loin dans l’instrumentalisation de phénomènes naturels, qui somme toute ne datent pas d’aujourd’hui. (...)
finalement, le slogan "Nous sommes en guerre !" est un slogan transposable, transférable aux mouvements sociaux qui ont précédé la crise sanitaire. Il installe définitivement un clivage contre l’ennemi, recrée une unité nationale contre lui, et malheur à ceux qui ne se mobilisent pas contre cet ennemi. Retrouver l’unité de la nation à peu de frais, c’est cela ?
Je pense que c’est à cette lumière qu’il faut comprendre la mesure de confinement général alors que d’autres stratégies basées sur la connaissance et la science étaient possibles. Je pense qu’il est tout à fait logique de tenter de relier les séquences que nous avons connues : Gilets jaunes - Réforme des retraites - Crise sanitaire. Pour cela, il ne faut pas se placer pour les observer sous l’angle des phénomènes sociaux ou naturels, mais se placer du point de vue de la stratégie gouvernementale qui n’a pas changé d’un pouce quoiqu’il en dise : le contrôle, l’abus de pouvoir, le mépris du peuple en raison de la position transcendante qu’a prise le Président de la république depuis son installation à l’Elysée.
C’est pourquoi, je ne pense pas qu’il faille taxer le gouvernement de légèreté, de maladresse, ou d’inconséquence, ou encore de communication malhabile. Je pense au contraire qu’il est tout à fait constant sur sa ligne de réformes. Réformes qu’il continue de poursuivre même pendant la crise sanitaire, selon sa philosophie d’une économie politique placée au tout premier plan. J’en veux pour preuve la commande de la part du gouvernement, d’une note courant mars 2020, faite à la Caisse des Dépôts et de Consignation pour quelques idées de réformes de l’Hôpital Public. Cette note révèle qu’on ne change pas une recette de privatisation qui marche si bien. (...)
En réalité, une réforme avec au coeur d’elle ses sacrifiés. (...)