
L’écrivain donne vie et voix à la lutte de salariés occupant leur abattoir pour sauver leur emploi.
Tenir : mot simple, mot dense, mot immense. Son exigence traverse ce roman brûlant. Tenir dans l’abattoir, à l’étourdissement, à l’équarrissage et au conditionnement. Tenir l’horaire, aller plus vite, refaire tous les jours les mêmes gestes, surmonter la fatigue et traquer l’épuisement.
Souvent, « le moyen de tenir, c’est d’pas réfléchir » - décapitation des poulets à la disqueuse, corps usés sur les chaînes d’abattage, sentiment de n’être pas même un rouage, plutôt la graisse noire qui l’enduit : mieux vaut alors ne pas penser. Et puis, quand la grève est lancée, tenir le mouvement : Des châteaux qui brûlent devient grand.
Les salariés de cet abattoir vont perdre leur travail faute de repreneur. Une majorité se lance dans la grève, l’occupation de l’usine et, fait inédit qui donne le vertige et la peur, la séquestration d’un secrétaire d’Etat chargé de négocier avec les travailleurs. Tout va très vite, à l’image de cette langue qui déboule et déboulonne, langue chorale où s’expriment, dans leur style, telle et tel ouvrier, secrétaire, assistante, le ministre lui-même et jusqu’au lieutenant du GIGN.
Car l’usine, on s’en doute, est encerclée ; l’affaire est nationale : quoi ? Un secrétaire d’Etat séquestré ? C’est bien pire que la chemise déchirée d’Air France, celle qui a fait oublier où se trouvait la vraie violence. L’enjeu est donc considérable : comment organiser l’occupation, ne pas plier et tout simplement, dans ce bras de fer démesuré, comment gagner ? (...)