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GISTI : Plein droit n° 101
« Le business de la migration » : 1996-1997 : l’épopée des Saint-Bernard
par Alain Morice Anthropologue, université Paris Diderot, CNRS-Urmis
Article mis en ligne le 2 septembre 2014
dernière modification le 27 août 2014

Le surgissement, en 1996, sur la scène médiatique et politique d’un mouvement de sans-papiers, bientôt désigné comme celui des « Saint-Bernard », surprend presque tout le monde, associations comprises. À force de solidarité et de cohésion entre ses membres autour d’un objectif unique – la régularisation, ce mouvement va s’étendre à l’ensemble du territoire avec des conséquences inattendues.

(...) Liberté de circulation, toujours et encore

Faute de perspective globale, submergées au jour le jour, les associations de soutien et les permanences juridiques ont quant à elles maintes fois cédé à la tentation du cas par cas, faisant le tri que les autorités leur délèguent. Mieux que rien ? Certes, pour les heureux élus qui bénéficiront d’une mesure favorable : dans le cadre d’une incessante urgence – là est une autre force du cas par cas –, cela se conçoit. Mais en même temps, cela détourne d’une solution plus radicale, qui est celle d’une large ouverture des frontières, la seule propre à permettre de jeter aux oubliettes ces notions politiquement détestables de « régularisation » et de « critères ».

On peut fouiller les quatre horizons : il n’y a pas d’autre solution. Tout le reste est injuste, de moins en moins efficace (si seulement c’est le but), de plus en plus coûteux, et avant tout opposé aux droits fondamentaux – particulièrement, on ne se lassera pas de le redire, aux traités internationaux qui préconisent les droits de « quitter tout pays y compris le sien » et de demander protection ailleurs.

La voie est tracée : ceux qui prônaient la liberté de circulation en 1996-1997 se faisaient au mieux rire au nez, et au pire traiter d’ennemis de l’État de droit ou de complices des négriers. Maintenant, on les écoute et l’on discute leurs arguments, ce qui est source d’optimisme. Il nous appartient désormais de voir comment cette liberté (qui n’est pas celle des États et des employeurs à « faire circuler » [11], mais celle des personnes, adossée à leurs droits plus qu’à leurs intérêts) doit se combiner avec une lutte contre le racisme et pour le respect du droit des travailleurs et des citoyens nouveaux venus. Le chantier n’est pas mince mais il est plus que jamais à notre portée.