
Sis à Strasbourg, le Conseil de l’Europe, est probablement l’organisation la plus méconnue du Vieux Continent. Même pour un public averti, la confusion est facile avec le Conseil européen — la réunion périodique des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union — et le Conseil de l’Union européenne — dont les multiples formations ministérielles codécident, avec le Parlement européen, des actes législatifs et budgétaires de l’Union (lire « L’avenir de l’Europe se discute à huis clos »). Or le Conseil de l’Europe n’a rien à voir avec l’Union européenne.
Au moment même où les populations, lassées par des années de crise économique, puis budgétaire, s’interrogent sur les finalités du processus d’intégration et sur la légitimité démocratique des institutions de Bruxelles, il est sans doute utile de se pencher sur le cas d’une organisation comme le Conseil, qui a toujours mis la démocratie et les droits des citoyens au centre de son action. (...)
La racine de l’actuel désamour entre les citoyens européens et l’Union est sans doute à rechercher dans la trop grande importance donnée à la chose économique dans le processus d’intégration. L’Union est vue comme un organisme faisant injonction de réduire les déficits. La structure même des pouvoirs de la Commission (fortement déséquilibrés en faveur de la politique de concurrence) crée un cercle vicieux dans lequel approfondir l’intégration signifie aiguiser la concurrence. Le fossé entre les populations, en proie à la crise sociale dans un monde marqué par la globalisation, et une Union perçue comme lointaine, technocratique, illégitime et non démocratique devient de plus en plus difficile à combler. La philosophie politique ayant présidé à la naissance du Conseil semble oubliée. Pourtant, appliquée à l’Union, elle donnerait un sens nouveau à l’intégration. La leçon du congrès de La Haye, les paroles de Rougemont et la redécouverte de l’institution pourraient alors être d’une grande utilité pour les citoyens et les dirigeants européens (...)