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« La richesse cachée des nations – Enquête sur les paradis fiscaux »
Article mis en ligne le 26 décembre 2013
dernière modification le 21 décembre 2013

Gabriel Zucman, avec ce livre, cherche surtout, semble-t-il, à impulser l’idée qu’il ne faut pas partir battu dans la lutte contre les paradis fiscaux. Au contraire, il faut agir, et il nous dit que des solutions existent pour les faire reculer et pour que les nations récupèrent leurs richesses perdues. Il note, dès le départ, que les paradis fiscaux sont au cœur de la crise européenne. Il renvoie dos à dos ceux qui baissent les bras, car le combat serait perdu d’avance (les paradis fiscaux étant des rouages essentiels du capitalisme financier, rouages utilisés par les riches et les puissants du monde entier) et ceux qui crient déjà victoire en prétendant que la bataille est presque gagnée (dès lors que tous, ou presque, ont promis d’abandonner le secret bancaire).

(...) Le quatrième chapitre est consacré aux préconisations et aux solutions avancées par l’auteur. Il articule son « plan d’action » autour de deux grands principes : contrainte et vérification. (...)

Gabriel Zucman développe une démonstration rarement exposée pour justifier ses mesures :

 L’absence de coopération entre les paradis fiscaux et l’administration française prive chaque année le Trésor public français de près de 20 milliards d’euros (provoquant de la dette).
 Il ne s’agit pas d’une « saine » concurrence fiscale, mais d’un vol pur et simple : ces territoires offrent aux contribuables qui le souhaitent la possibilité de voler leurs États.
 La France n’a pas à payer le prix de l’attitude de ces paradis fiscaux. Le secret bancaire, comme l’émission de gaz à effet de serre, a un coût pour le monde entier que les paradis fiscaux veulent ignorer (il s’agirait, en quelque sorte, d’une « externalité négative »).
 La solution, c’est d’instituer une taxe égale aux pertes que subissent les États du fait des comportements de ces paradis fiscaux (les pollueurs doivent payer).

Dit autrement : le secret bancaire est une forme déguisée de subvention. Le secret bancaire donne aux banques offshore un avantage concurrentiel par rapport aux autres banques. Ces subventions déguisées entravent le bon fonctionnement des marchés. L’OMC doit décourager ces pratiques déloyales en autorisant les pays qui en sont victimes à imposer des droits de douane supplémentaires compensant le préjudice qu’ils subissent. (...)

Il s’agit de créer des outils de vérification car, une fois que les paradis fiscaux auront accepté de coopérer, il faudra bien s’assurer qu’ils le font en pratique. (...)

Contre l’optimisation fiscale des multinationales. Zucman note que l’existence éventuelle d’un impôt progressif sur la fortune ne supprime pas la nécessité d’un impôt sur les profits annuels des sociétés. Il constate, à juste titre, que l’existence des paradis fiscaux a vidé, et vide l’impôt sur les sociétés de toute effectivité pour les multinationales. Il aurait même pu ajouter que, grâce aux paradis fiscaux, les multinationales payent très peu d’impôts aux budgets des États, qu’elles font de la concurrence déloyale aux autres entreprises plus petites, qu’elles peuvent ainsi, progressivement, s’accaparer une partie de leurs clientèles et de leurs marchés, qu’elles peuvent ensuite distribuer plus de dividendes à leurs actionnaires et à leurs cadres dirigeants, qui seront eux-mêmes plus riches et utiliseront aussi les paradis fiscaux, et que tout ceci contribue à accroitre les difficultés budgétaires des États. (...)

Il y a très certainement plusieurs explications à cette grande tolérance des classes politiques dirigeantes à l’égard des excès des banquiers, des financiers, et, plus globalement, de « l’élite » économique : il s’agit en partie du même monde, comme nous le montrent souvent les études menées par le couple Pinçon-Charlot, un même monde qui co-participe à la gestion du monde dans son propre intérêt collectif (...)