
Sur les points brûlants –décrochage, notes et évaluation des élèves, orientation scolaire–, les mesures proposées par Vincent Peillon sont bien minces.
Etaler sur quatre jours et demi les horaires de l’école primaire (au lieu de quatre), retrancher quotidiennement une demi-heure de présence scolaire (sortie à 16h) et rajouter trois-quarts d’heures d’activités périscolaires...
Cette réformette proposée par Vincent Peillon a mis des milliers d’enseignants sur le pavé pour protester. Ce projet de modification des rythmes scolaires flaire le compromis de haute volée, et propose une inflexion plutôt qu’une profonde réforme au bénéfice des enfants –la semaine de quatre jours et demi, version simplifiée, existait en 2008. Il y a tellement longtemps que s’annoncent à grands clairons de vraies améliorations de notre système scolaire et que ces intentions s’écrasent en plein vol, que plus personne ne s’en offusque.
Que devrait être une véritable Refondation de l’école ?
1. Une école rompant avec le flou du système scolaire actuel qui entremêle deux objectifs contradictoires en termes d’allocations de moyens et de programmes (...)
revoir la sélection par la filière S, le système des classes préparatoires et celui des grandes écoles.
2. Une école qui accorderait une vraie chance à l’enseignement professionnel et technique. (...)
3. Une école qui aurait comme priorité financière absolue la mise à niveau des enfants sortant chaque année du système scolaire sans diplôme ou avec juste le brevet.
4. Une école dans laquelle les enseignants seraient plus présents dans le quotidien et dont le service s’étalerait sur davantage de mois durant l’année ; qui développerait l’enseignement personnalisé pour les élèves en difficulté ; qui mettrait en priorité l’amélioration des compétences de chacun et non le classement permanent ; qui aurait pour objectif de favoriser la coopération et le travail collectif autant que la performance individuelle (...)
Le système scolaire d’autres pays, en particulier dans l’Europe du nord, fonctionne selon des logiques moins brutales pour les couches populaires, et plus efficaces pour l’insertion : plus d’efforts financiers et pédagogiques pour atteindre un niveau éducatif de bonne qualité pour presque tous les élèves, sélection de l’élite reportée à plus tard à l’université ou dans la vie professionnelle, valorisation des filières techniques et d’apprentissage.
Pourquoi ne pas s’en inspirer ? Pourquoi choisir le modèle japonais plutôt que le modèle finlandais ou suédois ?
Sur le diagnostic des faiblesses de l’école française, le rapport sur la Refondation de l’école remis à l’automne 2012 est impeccable : on lui met sans hésitation une excellente note. Il relaie et conforte d’ailleurs d’innombrables analyses établies par les spécialistes de l’éducation depuis des décennies. Mais, pallier ces défaillances supposerait un renversement copernicien des esprits. Or, à le projet de loi présenté par le ministre de l’Education nationale n’en prend pas du tout le chemin. (...)
Continuera sûrement de s’imposer une dynamique de compétition féroce au détriment d’un projet global d’insertion, qui supposerait, probablement, de fixer comme moins prioritaire dans le secondaire la finalité d’excellence d’une petite fraction d’élèves.
La consultation lancée sur la Refondation de l’école remue, de fait, les thèmes classiques qui concernent en tout premier lieu la relation enseignants/enfants, et peu l’organisation du système.
les milieux populaires ont du mal à se révolter contre un édifice auréolé des seules valeurs de la méritocratie –si, donc, leurs enfants ne réussissent pas, elles n’ont qu’à s’en prendre à elles-mêmes. Or, les retombées, tant pour l’emploi que pour le moral des jeunes, de l’échec scolaire et des désillusions sur l’orientation sont telles que la vraie Refondation supposerait des révisions autrement plus brutales. Elles impliqueraient de mettre fin au jeu d’illusionniste du « plus ça change, plus c’est la même chose ».