
Hanine Zoabi, députée palestinienne à la Knesset, le Parlement israélien, représentant le parti arabe Balad, était de passage à Bordeaux pour une conférence sur la Palestine. Quatre ans après l’épisode du Mavi Marmara, le bateau turc de la flottille qui a voulu briser le blocus de Gaza en 2010, elle n’a rien perdu de son engagement pour la cause palestinienne.
(...) Hanine Zoabi était à bord du Mavi Marmara. Abordé le 31 mai 2010 par l’assaut des commandos israéliens, l’opération a coûté la vie à dix militants (le dernier vient de décéder récemment de ses blessures).
La droite et l’extrême droite israéliennes ont voulu la juger pour « terrorisme », pour « trahison », et ont multiplié à son encontre motions, votes, recours en justice, violences verbale et physique, menaces de mort… (...)
Quatre plus tard, nous avons voulu savoir quelle était la situation de la député palestinienne à peine quarantenaire. Entretien (la rencontre a eu lieu avant l’annonce du kidnapping de trois adolescents israéliens en Cisjordanie, qui crée une nouvelle situation de crise entre Israël et l’Autorité palestinienne).
Rue89 : Quelle est votre situation aujourd’hui ?
Hanine Zoabi : La Cour suprême a invalidé l’interdiction de me présenter aux élections de janvier 2013, donc me revoilà élue. J’ai récupéré mon passeport diplomatique, ce qui me permet d’être aujourd’hui en France.
Mais il reste une rancœur que je rencontre au quotidien, dans les restaurants et les magasins où les Israéliens s’offusquent de me voir, m’agressent et demandent à ce que je ne sois pas servie par exemple.
Mes ennemis politiques n’ont pas changé. Ils le restent ! (...)
C’est un geste fort et positif des autorités israéliennes de vous redonner vos droits civiques, alors ?
Je suis l’exemple parfait que l’Etat israélien veut utiliser pour démentir mes affirmations et mes déclarations sur l’absence de démocratie. Je suis en quelque sorte instrumentalisée comme toute la représentation politique arabe au sein de la Knesset.
Nous n’y avons aucun pouvoir de décision. Nous sommes là pour la représentation et nous ne sommes pas écoutés. Nous sommes là pour qu’Israël puisse dire : « Vous voyez, je fais de la place aux Arabes israéliens. »
Or, c’est un Etat qui veut d’abord être un Etat juif pour le peuple juif. La démocratie est incompatible dans ce cas et l’avenir des Arabes israéliens loin d’être certain. Il faut, pour que leur discours soit vrai, que l’Etat se déclare laïque et il deviendra ainsi démocratique. (...)
J’y suis pour me faire entendre et m’exprimer sur le sort du peuple palestinien. De cette manière, je choisis la confrontation politique pour la résistance et non pas la clandestinité.
Quand on débaptise des villages, des places et des rues de leurs noms arabes pour leurs donner des noms israéliens, nous sommes là pour nous insurger. Quand ils votent des lois racistes – il y en a 50 aujourd’hui –, nous sommes là pour les dénoncer. C’est notre opposition, notre lutteJe rappelle tous les jours les conditions de vie des Palestiniens. Si nous, les députés arabes, ne le faisons pas, qui le fera ? Les pays européens et les Etats-Unis ? ! (...)
–