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La Finlande loge les SDF... et ça va beaucoup mieux
Article mis en ligne le 6 septembre 2017
dernière modification le 4 septembre 2017

Depuis plus de trente ans, la Finlande met en œuvre une politique volontariste pour résoudre la question des SDF : « un logement d’abord » et la réinsertion suit. Selon ses promoteurs, cette politique « permet d’économiser 15.000 euros par an et par personne ».

Depuis les années 1980, ce pays du nord de l’Europe est passé de près de 20.000 à 6.644 personnes sans domicile fixe (SDF).

À titre de comparaison, en France, le nombre de SDF a augmenté de 50 % depuis 2001 pour atteindre les 141.500 début 2012, d’après le rapport sur le mal-logement édité par la Fondation Abbé-Pierre. Certes, la France est douze fois plus peuplée que la Finlande. Mais en proportion, ces chiffres montrent que le pays scandinave compte deux fois moins de SDF que la France.

Le secret de cette réussite ? Une politique menée du local au national, nommée « un logement d’abord », portée par des acteurs engagés issus de trois ministères fondamentaux : l’Environnement, chargé de la construction et de la rénovation des habitations ; les Affaires sociales et la Santé, pour la prise en charge des personnes ; et les Finances, pour dégager le budget nécessaire et soutenir les initiatives. (...)

Les personnes concernées sont celles complètement sans domicile depuis un an ou de façon répétée durant trois ans. Les causes sont variées : environnement difficile ou insalubre, problèmes d’alcool, incapacité à payer son loyer, etc. En Finlande, 80 % des SDF logent chez des amis ou de la famille. Dormir dans la rue est impossible la moitié de l’année, pour cause de grand froid, les températures pouvant baisser jusqu’à - 25 °C l’hiver en ville.

240 millions d’euros ont été dépensés en huit ans, amortis en quelques années

C’est en 2008 qu’est lancé le programme Paavo, qui acte la rénovation des refuges en appartements d’une ou deux pièces à destination des SDF et la construction de milliers de nouveaux logements. L’expérimentation se fait d’abord dans dix villes, avec lesquelles ont été établis des contrats détaillés. « Nous n’avons plus de centres d’accueil de nuit, qui faisaient d’ailleurs partie du problème. Ce ne sont pas des endroits où vivre humainement », explique Peter Fredriksson. Le gouvernement s’est aussi engagé à financer la totalité des nouveaux investissements nécessaires (construction de nouveaux logements, nouveau personnel, matériel médical…) : 50 % sous forme de bourses, 50 % sous forme de prêts. Au total, 240 millions d’euros ont été dépensés en huit ans, amortis en quelques années. (...)

Onze personnes travaillent à Vaïnolä, mais « aucune n’a l’autorité de dire aux locataires ce qu’ils doivent faire », insiste la directrice, Pilvi. « Nous travaillons la confiance et la communication. Nous ne sommes pas des professionnels qui viennent imposer leur expertise, nous collaborons. Les locataires ne seront pas mis à la rue en cas de désaccord, on tentera toujours de trouver des solutions. » Rares sont en effet les personnes qui ne trouvent pas, ici, une stabilité. Dans ce cas, il s’agit de problèmes plus profonds de violence ou de maladie mentale qui doivent être traités dans un autre cadre. (...)

Väinolä accueille de nombreuses personnes issues de l’immigration, comme Sébastien. Des drapeaux de la Somalie, d’Irak ou encore de Roumanie sont affichés au mur de l’entrée, à côté de celui de la France. Aucune famille ne vit ici et seulement deux appartements peuvent accueillir des couples. Le centre est géré par l’Armée du Salut, mais c’est la ville d’Espoo qui reçoit les candidatures et qui répartit les personnes en fonction de leur dossier. Pour les jeunes en difficulté avec des problèmes d’alcool ou de drogue, la résidence Rukkila est ainsi plus adaptée, au nord de la capitale finlandaise. En plein centre d’Helsinki, un autre bloc au milieu d’un quartier résidentiel accueille depuis dix ans les SDF plus âgés. Certains sont encore alcooliques, d’autres sont devenus sobres après avoir enfin pu poser leur sac sous un toit qui leur appartient. La Fondation Y a ainsi des logements dans 55 villes différentes de Finlande. Certains dans des blocs, d’autres éparpillés dans des immeubles « classiques ». Les procédures pour obtenir un contrat peuvent être plus ou moins longues en fonction de la disponibilité des logements. Il est possible d’attendre jusqu’à deux ans. (...)

En Finlande, petit à petit, les SDF disparaissent, non pas dans l’oubli, mais en reprenant leur place dans la société.