
De toutes les grandes idéologies du XXe siècle, le fascisme est la seule à naître avec le siècle. Troisième voie entre le libéralisme et le socialisme marxiste, elle propose une autre solution aux problèmes que posent la révolution technique et la révolution intellectuelle à la société européenne du tournant du siècle. Entre cette crise du libéralisme et la naissance du fascisme s’intercale le phénomène fondamental de la Première Guerre mondiale.
La Première Guerre mondiale a fourni les troupes et les conditions de détresse qui ont fait que l’idéologie fasciste a pu prendre corps après la fin des hostilités. Ce terrible événement a fourni un élément important dans la genèse du fascisme : « l’esprit des tranchées » où bourgeois, ouvriers et paysans avaient combattu ensemble l’ennemi de la nation. Dans ces tranchées des « déclassés » y ont trouvé une place. Des déclassés qui, une fois la guerre finie, n’ont plus eu leur place. Alors nombreux parmi les laissés pour compte aspirent à un retour en arrière, idéalisant ‘l’ancien temps ».
Après la « Grande Boucherie de 14″, les Français rêvent de revenir à la Belle Époque, période magnifiée dans les esprits, et ils aspirent en même temps à perpétuer la solidarité, la fraternité des tranchées. Ils vont mettre six à huit ans avant de se rendre compte que plus rien ne sera comme avant. (...)
Devant la détresse d’une population traumatisée, le fascisme apparait comme la synthèse du nationalisme et du socialisme. Mais ensuite, le socialisme est bien vite oublié au profit du conservatisme social. Cette idéologie capable de monter à l’assaut de l’ordre établi et de concurrencer efficacement le marxisme dans l’esprit de certains intellectuels aussi bien que des masses, va considérer qu’il n’y a pas d’alternative au capitalisme et à la recherche du profit. Le prolétariat ayant cessé d’être une force révolutionnaire, c’est à la nation de prendre la relève pour briser l’héritage des Lumières, et pour restaurer la grandeur de la nation il est indispensable de s’appuyer sur ceux qui possèdent les moyens de production. La bourgeoisie préoccupée par les événements et les nouvelles de Russie, voit d’un œil bienveillant la montée de la doctrine fasciste. (...)
Le fascisme est la roue de secours du capitalisme. Quand l’exploitation sociale reste possible dans le cadre dit « démocratique », le capitalisme tolère des ilots de liberté. Dès lors que cette exploitation sociale devient compliquée, le capitalisme impose ses lois de façon autoritaire et le fascisme lui permet de retrouver ses marques. Avec des amis fascistes, le prolétariat n’a décidément pas besoin d’ennemis